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L’ŒUVRE EROTIQUE ET L’ŒUVRE PORNOGRAPHIQUE A L’AUNE DU DROIT PENAL IVOIRIEN

Photo du rédacteur: Bléa AlbanBléa Alban

LOI N° 2019-574 MODIFIEE PAR LA LOI N°2021-893 DU 21 DECEMBRE 2021 ET LA LOI n°2024-358 du 1 juin 2024 PORTANT CODE PENAL

 

Attentat à la pudeur

Article  405. - Constitue un attentat à la pudeur, toute atteinte sexuelle sans pénétration, commise sur une personne du même ou de l'autre sexe.

Est puni d’un emprisonnement d’un à trois ans et d1une amende de 50.000 à 500.000 francs, quiconque commet un attentat à la pudeur consommé ou tenté.

Article  406. - Est puni d'un emprisonnement de deux à cinq ans et d'une amende de 100.000 à 1.000.000 de francs, quiconque commet un attentat à la pudeur consommé ou tenté avec violences. L'emprisonnement est de cinq à dix ans et l'amende de 200.000 à 2.000.000 de francs lorsque ;

1° l'attentat à la pudeur est commis par un ascendant, un adoptant ou par toute autre personne ayant autorité sur la victime ;

2° l'auteur est aidé par une ou plusieurs personnes ;

3° la victime est mineure ;

4° l'auteur appartient au corps médical ou paramédical ou est chargé d'administrer des soins à la victime.

Article  407. - Est puni d'un emprisonnement d’un à trois ans et d'une amende de 360.000 à 1.000.000 de francs quiconque commet un attentat à la pudeur, consommé ou tenté sans violence, sur la personne d'un mineur.

Article  408. - Est puni d'un emprisonnement d’un à cinq ans et d'une amende de 100.000 à 500.000 francs, l'auteur de tout attentat à la pudeur, consommé ou tenté sans violence sur un mineur s'il est l'une des personnes mentionnées au 1°du deuxième alinéa de l'Article 406.

Article  409. - Les dispositions de la présente section concernant les mineurs sont applicables lorsque l'attentat à la pudeur est commis sur une personne incapable de se protéger en raison de son état physique ou mental.

En cas de condamnation pour l'un des délits prévus par la présente section, le juge peut prononcer la privation des droits, l'interdiction de paraître en certains lieux ou l'interdiction du territoire de la République et l'interdiction de l'activité professionnelle prévues par les Articles 68 à 72, 80 à 83 et 85.

 

 

Outrage public à la pudeur

Article  416. - Constitue un outrage public à la pudeur, tout acte commis dans un lieu public ou ouvert au public ou dans les conditions prévues à l'Article 184, offensant les bonnes mœurs ou le sentiment moral des personnes qui en sont involontairement témoins et susceptible de troubler l’ordre public.

Est puni d'un emprisonnement de trois mois à deux ans et d'une amende de 50.000 à 500.000 francs, quiconque commet un outrage public à la pudeur.

Les peines peuvent être portées au double si l'infraction est commise sur un mineur ou en présence de celui-ci.

Article  417. - Est puni d'un emprisonnement de deux mois à deux ans et d'une amende de 300.000 à 3.000.000 de francs ou de l’une de ces peines seulement, quiconque, publie et diffuse par le livre, la presse, la cinématographie, la radiophonie, la télévision ou par tout autre moyen, des textes, dessins, photographies, images quelconques ou messages sonores de nature à révéler l'identité de la victime d'une des infractions prévues au présent chapitre.


 

I. Distinction entre l’œuvre érotique et l’œuvre pornographique

En droit ivoirien, la distinction entre l’œuvre érotique et pornographique repose sur l’intention et l’impact moral. L’œuvre érotique, bien que décrivant l’acte amoureux, conserve une dimension esthétique ou sentimentale, tandis que la pornographie se focalise sur la mécanique physiologique des rapports sexuels, avec un effet avilissant sur les mœurs. Cette distinction s’aligne sur les principes généraux de l’article 416 du Code pénal ivoirien, qui réprime l’outrage public à la pudeur. Les tribunaux ivoiriens pourraient s’inspirer des critères jurisprudentiels français (ex. T. corr. Paris, 5 oct. 1972) pour évaluer si une œuvre privilégie une représentation dégradante ou artistique.

 

II. Réglementation des films pornographiques

La loi n°2017-868 du 27 décembre 2017 portant régime juridique de la communication audiovisuelle encadre la diffusion de contenus sensibles. Bien que cette loi ne mentionne pas explicitement la pornographie, elle habilite le Conseil national de la communication audiovisuelle à classifier les œuvres selon leur impact moral. Les films pornographiques pourraient être tolérés sous conditions strictes (accès restreint aux adultes), mais ceux mettant en scène des violences ou perversions sexuelles (ex. Crim. 25 janv. 1979) seraient prohibés au titre de l’article 416 du Code pénal, car portant outrage aux bonnes mœurs. Les cassettes vidéo ou supports numériques relèveraient du même régime (ex. Crim. 6 mai 1986).

 

III. Pouvoir d’appréciation des juges et autorisations administratives

En Côte d’Ivoire, les juges conservent un pouvoir souverain pour qualifier une infraction, indépendamment des autorisations administratives. Ainsi, même si un magasin détient une licence pour vendre des produits dits « adultes », la découverte de films « dégradants et odieux » (ex. Crim. 26 avr. 1983) permettrait aux tribunaux de retenir l’outrage aux bonnes mœurs (art. 416 CP). Cette approche est conforme au principe de séparation des pouvoirs et à la primauté du droit pénal sur les autorisations sectorielles.

 

IV. Appréciation de la moralité selon le public cible

L’évaluation de l’immoralité d’un objet ou d’une image dépend du public visé, conformément à une interprétation contextuelle de l’article 416 du Code pénal. Par exemple, un contenu érotique diffusé à un public adulte dans un cadre contrôlé pourrait être toléré, tandis que le même contenu accessible aux mineurs serait réprimé. Les tribunaux ivoiriens pourraient s’appuyer sur des décisions comme Lyon, 22 mars 1956, pour sanctionner les productions exploitant la vulnérabilité des jeunes (ex. excitation érotique malsaine).

 

V. Applications de l’outrage aux bonnes mœurs aux œuvres écrites

Les écrits dépourvus de valeur littéraire ou artistique, et axés sur la glorification de la débauche (ex. Paris, 1er juin 1972), relèveraient de l’article 416 du Code pénal. En Côte d’Ivoire, un ouvrage décrit comme un « ramassis de scènes sordides » (T. corr. Paris, 12 janv. 1972) serait jugé contraire aux bonnes mœurs, surtout s’il vise à éveiller des instincts malsains. La jurisprudence ivoirienne pourrait assimiler ces critères à ceux de l’indécence publique.

 

VI. Pornographie impliquant des mineurs

La loi de 2016 sur la lutte contre la traite des personnes, notamment des enfants, interdit strictement la représentation de rapports sexuels avec des mineurs. L’article 414 du Code pénal ivoirien réprime la pédophilie basée sur des actes de manipulation pornographique infantile, aligné sur les standards internationaux comme la Convention des droits de l’enfant. Ainsi, tout écrit ou film mettant en scène des enfants dans un contexte sexuel (ex. Paris, 14 déc. 1994) serait sévèrement sanctionné.

 

VII. Pornographie déguisée en reportage

Un reportage utilisant des images ou récits scabreux sous couvert d’information (ex. Paris, 11 mars 1998) pourrait être qualifié de pornographique si son contenu banalise l’exploitation sexuelle des enfants. En droit ivoirien, l’article 369 du Code pénal punit la diffusion de messages portant atteinte à la dignité humaine, notamment via la promotion de violences sexuelles. Une telle présentation, même justifiée par un motif informatif, serait illicite si elle recourt à des détails superflus et avilissants (ex. T. corr. Paris, 12 sept. 1997).

 

Conclusion

Le droit ivoirien, à travers le Code pénal et les lois sectorielles, offre un cadre robuste pour réprimer l’immoralité pornographique et protéger l’ordre public. Les critères jurisprudentiels français, bien que non contraignants, inspirent une interprétation contextuelle et téléologique des textes, privilégiant la protection des mœurs et de la dignité humaine, notamment des mineurs.

 

 

Par Pr. BLEA Alban

 

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