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CONCOURS DIRECT - MAGISTRATURE SESSION OCTOBRE 2021 EPREUVE DE : DROIT ADMINISTRATIF (CI)

SUJET : COMMENTAIRE D’ARTICLES

Faire le commentaire conjoint des articles 67 et 68 de la loi n°2018-978 du 27 décembre 2018 sur le Conseil d’Etat.

ARTICLE 67 : Si une décision administrative faisant grief à une personne n’intéresse ni le maintien de l’ordre, ni la sécurité ou la tranquillité publique, elle peut faire l’objet d’une requête aux fins de sursis à exécution devant le Conseil d’Etat, après l’exercice du recours administratif préalable prévu.

ARTICLE 68 : Le Conseil d’Etat peut ordonner la suspension de l’exécution de la décision entreprise, même de refus, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. La suspension ainsi prononcée reste en vigueur jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la requête en annulation pour excès de pouvoir de la décision. Toutefois, le sursis et ses effets deviennent caducs si, quatre mois après son prononcé, le bénéficiaire n’a pas déposé de requête aux fins d’annulation de la décision suspendue.



PROPOSITION DE CORRIGE

INTRODUCTION 3 points

✓ Option offerte à l’administré de solliciter la suspension des effets de l’acte administratif jusqu’au prononcé de la décision du juge de l’excès de pouvoir sur le fond de l’affaire.

✓ Sous l’emprise de l’ancienne loi sur la Cour Suprême l’exercice du sursis à l’exécution était conditionné par la saisine du juge de la légalité par le recours pour excès de pouvoir.

✓ La loi n°2018-978 du 27 décembre 2018 sur le Conseil d’Etat ne conditionne plus l’exercice du sursis à l’exécution à la saisine du juge de l’excès de pouvoir. L’exercice du recours administratif préalable suffit à demander au juge de la légalité de suspendre un acte administratif faisant grief.

✓ Annonce du plan.


I – LES CONDITIONS D’EXERCICE DU SURSIS À EXÉCUTION 8.5 points

A – Les conditions de forme de recevabilité 4.5 points

✓ La nature de l’acte (indiquer qu’il s’agir d’un acte administratif faisant grief). Le sursis ne peut être dirigé ni contre un acte d’ordre intérieur ni une décision juridictionnelle (voir arrêt n°55 du 28 mars 2012, Société IGCI C/ Arrêt n°63 du 21 décembre 2011).

✓ La demande de sursis peut être exercée à l’encontre de toutes décisions administratives à l’exclusion des décisions intéressant le maintien de l’ordre, la sécurité et la tranquillité publique (art 67). On peut citer l’arrêt n°88 du 23 mai 2012 SOPHIA AIRLINES C/ ANAC. Dans cette affaire, la Cour a rejeté pour irrecevabilité la demande dirigée contre la décision du Directeur Général de l’ANAC, qui a suspendu le permis d’exploitation aérienne, dès lors que la décision en cause est motivée par « la violation de la résolution

1752 des Nations-Unies relative à l’embargo sur les armes et le transport des mercenaires ». Cette décision touchait l’ordre et la sécurité publique.

✓ L’obligation de l’exercice d’un recours administratif préalable (recours gracieux ou hiérarchique).

✓ La demande de sursis doit être dirigée contre la même décision que celle qui fait l’objet du recours administratif préalable.

✓ La demande de sursis doit être présentée par voie de requête.


B- Les conditions de fond 4 points

L’arrêt de principe (C.E. 12 novembre 1938 Chambre Syndicale des Constructeurs d’Avion in GAJA n°62) permet de déduire que la possibilité d’obtenir le sursis d’un acte administratif est subordonnée à deux conditions cumulatives : l’urgence et l’existence de moyens sérieux de nature à faire douter de la légalité de l’acte.

L’urgence est la condition première du sursis. C’est lorsque l’urgence le justifie que le Conseil d’Etat peut envisager le prononcé de la suspension de l’exécution de la décision administrative. Elle constitue la raison d’être de la procédure de sursis. Elle suppose que l’acte ou le comportement litigieux crée une situation difficilement réversible ou que l’acte ou le comportement de l’administration préjudicie gravement à la situation que le requérant entend défendre.

NB : Préciser que l’urgence s’apprécie non à la date de l’introduction de la requête, mais au jour où le juge de l’urgence est appelé à se prononcer sur celle-ci.

L’existence de moyens sérieux de nature à faire douter de la légalité de l’acte attaqué

Le prononcé du sursis suppose des moyens sérieux et paraissant, en l’état de l’instruction, de nature à justifier l’annulation de la décision attaquée. Le sursis ne peut être octroyé qu’à l’égard d’actes administratifs dont l’annulation est certaine. L’absence de moyens sérieux conduit inexorablement au rejet de la requête par le Conseil d’Etat.

NB : le candidat pourra indiquer, éventuellement que le maniement de la condition de moyens sérieux est délicat, car cela implique « en l’état de l’instruction », une appréciation au fond des moyens de légalité avancés par la requête.

II – LA DÉCISION PRONONÇANT LE SURSIS À L’EXÉCUTION 6.5 points A- LA PORTÉE DE LA DÉCISION DE SURSIS À L’EXÉCUTION 3 points

✓ Suspension partielle ou totale de la décision entreprise.

✓ La décision de sursis permet au juge de faire échec au principe cardinal du droit administratif, à savoir le caractère exécutoire de la décision administrative.

✓ La décision de sursis ne met pas en cause la validité de l’acte attaqué. Elle ne fait que suspendre ses effets partiellement ou totalement.

✓ La décision de sursis à exécution prive le bénéficiaire de l’acte de s’en prévaloir.

NB : L’acte suspendu retrouve son plein et entier effet, si le juge de l’excès de pouvoir rejette la demande du requérant.

B – LA DURÉE DE LA DÉCISION DE SURSIS À L’EXÉCUTION 3.5 points

✓ La décision de suspension reste en vigueur jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la requête en annulation pour excès de pouvoir de la décision entreprise. (Mettre en exergue que cette décision n’est pas illimitée dans le temps).

✓ La décision du sursis à l’exécution étant provisoire, le prononcé de la décision par le juge de l’excès de pouvoir met fin à son existence.

✓ La décision devient caduque si au terme d’un délai de quatre (4) mois à compter de son prononcé, le bénéficiaire de la décision de sursis à exécution n’a pas exercé un recours en annulation pour excès de pouvoir contre la l’acte faisant l’objet du sursis. En pareille hypothèse, la décision suspendue retrouve son plein et entier effet et produit ses effets de droit.


CONCLUSION : 1 point

Aux termes des dispositions des articles 67 et 68 de la loi n°2018-978 du 27 décembre

2018 sur le Conseil d’Etat à commenter, l’on peut retenir que le sursis à exécution est désormais dissocié du recours en annulation. Il est recevable dès lors que le requérant justifie, au moment du dépôt de la requête en sursis, avoir exercé le recours administratif préalable obligatoire.

‹‹ Bonne présentation : copie propre, sans rature ni surcharge : 01 point

Bonne expression écrite : bon niveau de langue, sans faute d’orthographe ni de grammaire : 01 point

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