LE CONSENTEMENT DES PARTIES
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LE CONSENTEMENT DES PARTIES

Pour les étudiants du groupe de renforcement Licence 2 d'Excellence Academie


Le consentement c’est l’accord de volonté en vue de faire naître un rapport juridique, c’est l’élément premier du contrat. Contracter c’est consentir en même temps et sur un même projet.

C’est aussi vouloir et c’est la raison pour laquelle il faut s’assurer que le consentement a était donné librement et en tout connaissance de cause

Le consentement doit exister et ne pas être affecté de vice.

Sous section 1 : l’existence du consentement

Le contrat se forme par la rencontre d’une offre et d’une acceptation. Une offre est admise, si elle est acceptée, le contrat définitif est formé.

Cette chronologie ne rend pas compte de la totalité des contrats pour certains d’entre eux, la conclusion du contrat est précédée d’une négociation qui peut être très longue et très complexe.

§1-Le mécanisme de l’offre et de l’acceptation

A. L’offre

Manifestation de volonté par laquelle une personne exprime son intention d’être liée si le destinataire de la manifestation l’accepte.

1. les caractères de l’offre

On s’interroge sur les éléments qui font qu’une déclaration de volonté devient une offre. Ces éléments sont au nombre de deux :

L’offre est préciseL’offre doit être ferme

L’offre est précise quant elle contient les éléments essentiels du futur contrat. Elle est essentielle quant ceux qui permettent de concevoir, de définir et de décider le contrat.

Ex: Pour un contrat de vente les éléments essentiels c’est la chose et le prix.

Pour un contrat de bail : élément essentiel : le bien loué, le loyer et la durée du bail.

Dans un contrat d’entreprise : la rémunération de l’entreprise n’est pas un élément essentiel du contrat parce que la rémunération est parfois difficile à chiffrer au moment de la conclusion du contrat (cour de cassation 28 novembre 2002), l’offre doit être ferme c’est à dire, elle doit exprimer une volonté non équivoque.

Une proposition est différente d’une offre si elle contient des réserves. Si dans les déclarations de volonté, on introduit des réserves comme un délai de réflexion cela signifie que celui qui répond, devient offreur.

Si dans la déclaration de volonté, il y a des réserves ce n’est pas une offre mais une invitation à entrer en pourparler. Celui qui répond émet une offre et l’auteur de l’initiative pourra accepter ou pas cette offre. On peut recevoir une réponse qui sera elle aussi une invitation à pourparler.

Une fois que les deux caractères sont réunis, toutes les formes d’expression de l’offre sont admissibles.

L’offre peut être une expression tacite et peu importe la qualité du destinataire de l’offre.

NB- Autre information importante

*La manifestation d’une volonté sérieuse : L’offrant veut s’engager juridiquement ; il propose de conclure tel contrat et veut donc s’engager juridiquement (a l’intention juridique). Ex. j’offre du champagne à tout le monde la semaine prochaine : est-ce une offre de contrat ? En principe non. Accord d’amitié, de mondanité : l’offre n’est pas sérieuse. Ex.2. Plusieurs commerçants décident de tenir un stand à plusieurs, un des commerçants offre la prise en charge des frais du champagne. Il y a intention juridique car les cocontractants pourront l’assigner en justice. C’est le juge en fonction du contexte, etc. qui décidera si intention juridique ou non

*L’émission d’une volonté définitive -La réserve subjective d’agrément Mon engagement ne dépend plus que du « oui » de l’autre. L’offre n’est pas provisoire. Je veux que le contrat soit conclu par la simple acceptation de mon offre.

Dans certaines propositions, l’offrant se réserve le pouvoir du dernier mot. C’est la réserve subjective d’agrément. Par ex., je propose de vous vendre ma voiture que vous connaissez bien (déterminé) pour tel prix, mais si vous acceptez, je me réserve encore le droit d’y réfléchir encore pendant huit jours. Ce n’est donc pas une offre de vente car elle n’est pas définitive. C’est une simple proposition (car pas définitive) sans effets juridiques ou alors un appel vis-à-vis de l’autre pour qu’il fasse une offre d’achat : face à cette fausse offre, l’autre répond ‘je suis d’accord’. C’est donc lui qui fait une offre d’achat. Il n’y a pas d’offre quand l’offrant assortit son offre d’une réserve subjective d’agrément.

-La réserve objective d’agrément La réserve subjective d’agrément dénature l’offre. Mais l’offre peut parfois être assortie d’une réserve objective d’agrément, c'est-à-dire une réserve qui ne dépend pas de la seule volonté de l’offrant mais de faits extérieurs pouvant être contrôlés par un tiers ou par le juge a posteriori. Ex. Je fais une offre d’achat d’un immeuble (après discussion) : « je vous propose de l’acheter pour 5 millions (=ferme et définitive, mais …) • SI son état après une visite plus approfondie me paraît plus satisfaisant. Si cette réserve dépend de la seule volonté de l’acheteur, il n’y a pas d’offre d’achat car c’est une réserve subjective d’agrément. • SI l’expert architecte, qui viendra visiter l’immeuble avec moi, trouve l’immeuble dans un état satisfaisant. Il y a offre d’achat sous condition suspensive. C’est une réserve d’agrément objective (dépend de l’avis d’un expert)

*La manifestation d’une volonté précise

-Les éléments essentiels du contrat

Elle doit contenir les éléments essentiels du contrat en question. Mais qu’est-ce que les éléments essentiels ?

• Voir, par ex., l’art 1583 CC: les éléments essentiels dans le cadre d’une vente : le bien à vendre (comp. exemple maison de repos) et le prix.

• Idem pour la location mais dans ce cas, si l’offre de location ne donne pas la durée, cela ne dénature pas l’offre. Car si non fixée, elle est établie de manière supplétive par la loi.

• Pour tous les autres contrats, cfr.voir jurisprudence. Si l’offre n’est pas précise en ce sens, ce n’est pas une offre.

-Les éléments subjectivement essentiels

L’offre contient parfois d’autres précisions sur des éléments pas réellement, objectivement essentiels, fondamentaux.

Ex. J’offre ma voiture pour 60 000 F à livrer dans3 mois. L’offre était suffisamment précise sans cette dernière précision mais l’offrant peut ajouter un élément subjectivement essentiel(en vertu liberté contractuelle). L’offre doit être acceptée telle quelle. Si l’éventuel acheteur accepte si la livraison a lieu dans un mois : c’est une contre offre, une offre d’achat. Si l’offrant veut ajouter des précisions importantes dans son offre, il ne doit pas les oublier car il risque des ennuis (le contrat sera conclu sans ceux-ci s’il les oublie).

Parfois les éléments subjectivement essentiels apparaissent dans les négociations. Si l’offrant l’oublie dans l’offre, le juge pourra dire qu’elles y sont implicitement. Mais ça peut être dangereux car seul le juge tranchera. Mais si il n’y a dans l’offre que les éléments objectivement essentiels, comment régler les points accessoires ? voy. art 1135 CC : il existe des tas de lois supplétives dans le

Code auxquelles les parties sont censés s’y référer sauf disposition contraire des parties.

Si éventuellement ça ne s’y trouve pas, il existe des usages dans certains secteurs professionnels et économiques. Et éventuellement, le juge complètera en usant de l’équité.

2.les effets de l’offre

C’est la question de la révocation de l’offre et la question de la caducité de l’offre.

a) la révocation de l’offre

Pour admettre que l’offre puisse être révoquée il faut avancer deux séries de considérations :

Tout d’abord, la liberté des individus doit être respectée, celui qui a émis une offre doit avoir la possibilité de révoquer ces propositions toutefois, les transactions juridiques doivent être relativement sures et donc une offre une fois émise doit être quand même maintenue durant un certain temps.

Le droit positif fait une distinction, si l’offre est assortie d’un délai, elle doit être maintenu pendant la durée de ce délai. Si l’auteur de l’offre se rétracte pendant la durée de ce délai, il engage sa responsabilité sur le fondement de l’art 1382 du code civil et sera amené à payer des dommages et intérêts. Arrêt de la cour de cassation 10/03/1968.Si l’offre ne comporte pas de délais elle doit être maintenu durant un délai raisonnable fixé par le juge.

Si l’auteur de l’offre se rétracte pendant le délai raisonnable ici aussi il engagera sa responsabilité délictuelle et il pourra être amené à payer des dommages et intérêt cour de cassation du 22 avril 1958.

b) la caducité de l’offre

Une offre de contracté deviens caduque dans deux hypothèses :

- le décès de l’auteur de l’offre rend l’offre caduque arrêt cour de cassation 10 mai 1989

lorsqu’on est arrivé au terme du délai fixé dans l’offre ou le délai raisonnable arrêt de la cour de cassation du 20 mai 1992 unes foi caduque l’offre ne produit plus d’effet juridique.

*L’offre est-elle obligatoire ? -Evolution : Question : « l’offrant est-il obligé de maintenir son offre ? » (et si oui, pendant quels délais ?) ou au contraire, est-il libre de la retirer quand il le veut ou de la modifier. Il est inutile de se référer au Code Civil. Dans un premier temps, on a donc dit que l’offre n’était pas obligatoire et l’offrant peut la retirer quand il le souhaite. Dans un second temps, ce n’était pas sociologiquement ni moralement, économiquement, acceptable : l’offre devait être obligatoire, maintenue pendant un certain temps. Si je demande un devis à un peintre, qui fait l’offre ? Je fais en réalité un appel d’offre (pas de prix proposé, etc.). C’est le peintre qui fait l’offre (étant entendu qu’il n’y a pas de clauses de réserve).

-Justification du caractère obligatoire de l’offre : La formation des contrats, s’ils n’étaient pas obligatoires, seraient soumis à un point d’interrogation. Comment le justifier ? Trois théories pour expliquer juridiquement le caractère obligatoire de l’offre : +La théorie de l’avant-contrat : celui qui fait une offre, tacitement il s’engage à maintenir cette offre pendant un certain délai. Ce deuxième engagement est accepté par le seul silence du destinataire (mais n’est pas engagé). Il y a donc un contrat sur ce point. Cet engagement est obligatoire sur base contractuelle. C’est une théorie artificielle car on sollicite le consentement du bénéficiaire de l’offre. Elle ne peut également expliquer le caractère obligatoire de l’offre que quand le destinataire est une personne déterminée. Cela ne marche pas pour les offres publiques ou collectives.

+Art 1382 CC : L’offre n’est pas obligatoire mais celui qui la retire, cause un dommage à son partenaire doit réparer le dommage causé (son comportement n’est pas celui d’un bon père de famille) Vice dans le raisonnement : ils commencent par déclarer que l’offre n’est pas obligatoire, donc cela ne peut être une faute que de ne pas la respecter. Les tenants de cette théorie ont donc fait évoluer l’idée : faute quand l’offre n’est pas maintenue dans certaines circonstances.

+Engagement par volonté unilatérale de volonté : ce type d’engagement est une source générale d’obligations, cfr. Cour de Cassation (même si pas de texte général à ce propos).C’est dans ce cadre qu’elle a déclaré que c’était une source autonome d’obligations et c’est dans ce cadre également qu’elle a justifié l’offre obligatoire.

-La durée du caractère obligatoire de l’offre 1) Soit l’offrant modalise son offre (par exemple, le devis peut ne valoir que pour 15 jours et qu’au-delà, il n’est pas lié ; au-delà, il n’est plus valable ; soit l’offrant refuse, soit l’offrant poursuit son offre) 2) Soit l’offrant n’a pas fixé de durée à son offre. Dans ce cas, on considère qu’il est tenu pendant un délai raisonnable. Cela dépendra des circonstances. Le problème est qu’une fois où l’offrant n’a pas fixé de durée et que l’on se base sur l’arrêt « durée raisonnable », il y a souvent contestation. C’est le juge qui va trancher, en fonction du temps pour examiner une telle offre, selon le texte, etc. Grand pouvoir d’appréciation pour le juge. 3) De temps en temps, le législateur peut décider qu’une offre doit être maintenue pendant tel ou tel délai. Ex. crédit à la consommation.



B. L’acceptation

L’acceptation est libre personne n’est tenu d’accepter une offre .On s’intéressera a la forme, l’objet et la connaissance de l’acceptation.

L’acceptation est l’agrément inconditionnel de l’offre, c’est l’acceptation telle quelle et sans réserve de l’offre.

*La réponse mise avec réserve sur un élément essentiel n’est pas une acceptation.

Par exemple, le destinataire répond à l’offrant qu’il est d’accord avec l’offre mais pas sur le prix (élément subjectif essentiel de l’offrant) : il n’y a pas acceptation.

Je vous achète le bien non à 20 000 mais à 15 000 : offre d’achat.

Je vous achète le bien mais pas à ce prix : proposition.

*La réponse peut aussi comporter une réserve sur un élément accessoire que l’acceptant souhaite rendre essentiel. Dans ce cas, on ne pourra pas parler non plus d’acceptation.

Je vous propose de vous livrer telle quantité de marchandise à X F le kilo. Le destinataire accepte mais à condition que ce soit livré dans les 24h : c’est un élément accessoire essentialisé. Il n’y a pas de contrat de vente mais y a t il offre d’achat ? Oui. Le contrat se formera sur la dernière offre émise à condition d’acceptation.

Voy. Cass. 23.02.69, Pas., 1970, I, 73

1. La forme de l’acceptation

Il n’y a pas de forme particulière, il suffit que la réponse traduise une volonté certaine de contracter cette acceptation peut donc être expresse c’est à dire écrite mais elle peut également résulter d’un simple gest, un hochement de tête, un oui. L’acceptation peut être tacite c’est à dire résulter de l’exécution du contrat.

La principale question qui se pose est de savoir si l’acceptation peut résulter d’un silence. Faut- il appliquer l’adage « qui ne dit mot consent » ?

La réponse de principe est qu'en droit des contrats le silence ne vaut pas acceptation car le silence ne permet pas de déceler une volonté de contracter on considère qu’il ne vaut pas acceptation, il y a des exceptions :

-il y a des lois spéciales qui prévoient que le silence correspond à une réponse positive. C’est notamment le cas en droit des assurances.

-Le silence vaut acceptation lorsque les usages d’une profession vont dans ce sens (ex : droit bancaire)

-Lorsque les parties sont en relation d’affaire depuis un certain temps et qu’elles ont un gros volume de transaction entre elles.

-Lorsque l’offre est faite dans l’intérêt exclusif du destinataire.

La jurisprudence récente confirme cette solution arrêt du 16 avril 1996 et l’arrêt du 18 avril 2000, il s’agissait de la réparation d’un bateaux de plaisance , le réparateur demandait le paiement de travaux non inclus dans le devis. Pour justifier sa demande il indiquait qu’il avait écris au propriétaire des bateaux pour l’informer qu’il y avait des travaux supplémentaires, les propriétaires n’ont pas répondu et les juges ont considérés que leur silence ne valait pas acceptation et par conséquent ils n’avaient pas a payer le prix des travaux supplémentaires.

2. L’objet de l’acceptation

La plupart du temps le simple « oui » suffit à former le contrat mais certaines situations sont plus complexes.

Il faut constater une concordance entre l’offre et l’acceptation

Il faut que l’acceptation soit conforme à l’offre. Si l’acceptant fait une réponse différente par rapport au terme et au contenu de l’offre, il s’agit d’une contre-proposition on rentre donc dans le système du marchandage.

Par ailleurs il faut se demander s’il est nécessaire que l’acceptant donne son accord sur l’ensemble des éléments de l’offre.

Il faut distinguer deux hypothèses :

*1er hypothèse : l’offre est complète c’est à dire elle contient tous les éléments du contrat envisagé. Dans ce cas celui qui veut former le contrat n’a pas besoin de préciser qu’il est d’accord sur tous les éléments.

Si il accepte uniquement les éléments essentiels : ex en matière de vente, la chose et le prix tout en refusant le délai de livraison dans ce cas le juge considère que le contrat n’est pas formé.

*2eme hypothèse : l’offre est réduite aux seuls éléments essentiels du contrat, le contrat sera définitivement formé si l’acceptation porte sur ces éléments essentiels. Pour les éléments accessoires les parties devront s’entendre plus tard et si elles n’y parviennent pas c’est le juge qui tranchera et il se référera alors aux usages.

3. La question du contrat entre absents

C’est un hypothèse plus ou moins complexe, celle dans laquelle les personnes qui veulent contracter sont géographiquement distantes l’une de l’autre. C’est par abus de langage qu’on parle de contrat entre absents, parce que l’absent en droit c’est celui dont on est resté longtemps sans nouvelle jusqu’à douter de son existence. C’est l’hypothèse de l’incertitude sur la personne. Or ici on fait allusion au contrat de personnes non présentes. C’est pourquoi l’appellation de contrat par correspondance traduit mieux la réalité. C’est un problème qui présente deux intérêts relativement à la date et au lieu de conclusion du contrat. En effet la date du contrat va permettre de déterminer à partir de quel les parties se sont soumises aux obligations contractuelles. Quant au lieu du contrat, il permet dans la plupart des cas de déterminer le tribunal compétent. A ce niveau, deux doctrines se sont manifestées, chacune défendant une théorie bien précise : - la théorie de l’émission : qui selon elle, le contrat entre absent est conclu à partir du moment où l’acceptant aura émis son intention d’accepter le contrat. Cette théorie contient deux sous variantes : *La théorie de la déclaration : il suffit que le destinataire ait émis son intention, son acceptation. *Le système de l’expédition : qui selon elle prend effet au moment où le destinataire se dessaisit de son acceptation en expédiant sa réponse. (Cette théorie contient des critiques dans la mesure où elle n’est pas totalement satisfaisante. Cette pourquoi une seconde théorie est née :

- la théorie de la réception : elle comprend deux sous variantes : *La théorie de la réception proprement dite, dans laquelle le contrat est formé en lieu et au moment de l’arrivée de l’acceptation. *La théorie de l’information en vertu de laquelle le contrat est conclu lorsque l’offrant aura effectivement eu connaissance de l’acceptation, c'est-à-dire concrètement quant il aura lu sa lettre. Mais dans ce cas aussi, il faut convenir que l’on fait dépendre la conclusion du contrat de la diligence bonne ou mauvaise de l’offrant. C’est ce qui explique certainement la contrariété de la jurisprudence qu’aucune des deux théories n’est satisfaisante. Selon la matière les juges appliqueront l’une ou l’autre des théories avec une préférence pour la théorie de l’émission.

§2 Le processus de négociation du contrat

La période précontractuelle est une période qui peut être plus ou moins longue. Les parties n’ont pas encore conclu leur contrat définitif. Elles n’en sont qu’aux préludes. Cette période peut être sériée en trois principales phases à savoir : la période des pourparlers, la promesse unilatérale de contrat et la promesse synallagmatique. On va envisager ces discussions de manière chronologique. L’initiative, la conduite et la fin des négociations.


A- L’initiative des pourparlers En raison du principe de la liberté contractuelle et de l’autonomie de la volonté, toute personne peut à tout moment prendre l’initiative d’entrer en pourparlers avec une ou plusieurs autres personnes. Ces démarches peuvent être officieuses ou officielles.

Deux grands principes ressortent de la jurisprudence. La conduite des négociations relève de la liberté contractuelle. On est libre de conclure ou de ne pas conclure. On est libre de stopper ou de continuer les négociations. On est libre du choix des contractants, donc de faire aboutir les négociations avec l’un ou avec l’autre. Pour autant, il ne faut pas que cette liberté dérive en abus. De sorte que les juges sont venus encadrer l’exercice de cette liberté. Les partenaires sont tenus d’un devoir de loyauté dans la conduite de la négociation. Elle n’est que l’expression d’un principe plus général, plus fondamental : bonne foi. Elle va imposer le devoir de mener des négociations de manière loyale, et le devoir d’information. Une obligation d’informer loyalement son partenaire. Chacun doit délivrer à l’autre des informations dont l’autre ne peut pas avoir accès. Qui sont déterminantes de son consentement. Cet arbitrage va dépendre notamment de la qualité des cocontractants. Lorsqu’il y a un rapport de force très équilibré, le devoir du plus fort prime. Le devoir d’informer du vendeur au consommateur, prime. Par exemple : je le laisse engager des frais très importants pour la négociation, et je romps brutalement la négociation. La difficulté sera évidemment de démontrer qu’il y a eu ou pas mauvaise foi. Le principe est le même : c’est bien la mauvaise foi.

La question qui se pose : quelle est la nature de la responsabilité du fautif que l’on va engager ? Est-ce une responsabilité contractuelle ou délictuelle ? Contractuelle (1147) : vient sanctionner un contractant qui a manqué à ses obligations contractuelles. Sanctionne l’inexécution fautive d’un contrat. Par hypothèse, on est dans les pourparlers. Puisqu’il n’y a pas de contrat, il n’y a pas d’inexécution du contrat. La responsabilité de celui qui rompt de manière fautive les pourparlers, c’est une responsabilité délictuelle (1382) : la faute est commise avant la conclusion du contrat.


B- La conduite des pourparlers On suppose ici que la négociation a été engagée soit elle se déroule librement c'est-à-dire les parties négocient de manière informelle et elles concluent ou pas le contrat, ou bien la négociation se trouve ponctuée et encadrée par un certains nombres d’accords que l’on appelle précontrat, accord de principe, promesses qui ont des forces juridiques plus ou moins contraignantes.


1) Les formes non contractuelles des pourparlers C’est une phase de discussion qui ne donne lieu à aucun accord formalisé. Les difficultés juridiques apparaissent lorsqu’une faute est commise pendant les discussions et que l’une des parties subit un préjudice. Par exemple la rupture brutale des pourparlers est-elle une attitude fautive susceptible d’engager la responsabilité civile de son auteur ? Sur ce terrain, la rupture des pourparlers n’est pas en elle-même fautive. Toute personne est en principe libre de rompre les pourparlers. Toutefois, cette rupture ne devient fautive que si elle s’accompagne de circonstances particulières c'est-à-dire s’il y a rupture abusive ou bien rupture de mauvaise foi, ou rupture avec intention de nuire. Arrêt du 06 janvier 1998 : la cour de cassation a considéré que le fait pour une partie de laisser les pourparlers se poursuivre tout en sachant qu’il y aurait échec constitue une faute qui engage la responsabilité civile de son auteur. Arrêt de la chambre Commerciale du 26 novembre 2003. Il y a eu une rupture fautive des pourparlers, la question qui se posait était : « quel est le préjudice à réparer ? ». Pour la cour de cassation le préjudice comprend : - Les frais engagés par la négociation « frais de déplacement ou de réception », et dans le préjudice, il peut y avoir le prix d’un certain nombre d’études. La Cour de Cassation indique que ce préjudice n’inclut pas les profits espérés de la conclusion du contrat. Lorsqu’une partie est l’auteur de rupture fautive et que la partie fautive conclut le contrat avec un tiers est-ce que la partie victime de la rupture peut engager la responsabilité du tiers au motif qu’il connaissait l’existence des pourparlers? La réponse de principe de la Cour de Cassation est que l’on ne peut pas engager la responsabilité du tiers sauf si la victime arrive à démontrer que le tiers a agi à son égard avec intention de nuire.


2) Les formes contractuelles de pourparlers. Ces formes contractuelles sont nombreuses et variées. On les retrouve sous le terme générique d’avant contrat. L’avant contrat c’est déjà un contrat mais il n’a pas la même force juridique que le contrat définitif car il ne fait que le préparer. Il y a trois formes d’avant contrat, il y a les contrats de négociation, les promesses de contrat, les contrats intérimaires et les contrats cadres.

a) les contrats de négociations On les appelle souvent des accords de principe ; ces accords obligent les parties à négocier en vue de conclure le contrat définitif. L’obligation essentielle de l’accord de principe est celui de négocier de bonne foi mais les parties n’ont pas l’obligation de conclure le contrat. Par exemple dans le cas d’un licenciement l’employeur peut prendre l’engagement d’examiner la réintégration d’un salarié si la conjoncture économique s’améliore, il a l’obligation d’examiner la candidature du salarié mais il n’aura pas l’obligation de l’embaucher.


b) les contrats intérimaires et les contrats cadres *Le contrat intérimaire c’est celui qui organise une négociation par exemple dans le cadre d’une vente. Le contrat intérimaire dira si l’essai est satisfaisant, le contrat de vente sera conclu avec une date de conclusion qui remonte au début de l’essai cette période d’essai se retrouve dans le Contrat de travail. *Le Contrat cadre a pour objet de définir les grandes lignes d’une opération contractuelle et il définit le cadre des relations qui vont s’établir à l’avenir entre les parties. Cela signifie que le contrat cadre prévoit la conclusion dans le futur d’un certain nombre de conventions d’application du contrat cadre lui-même. Par exemple : dans les relations entre un débit de boisson et un brasseur, il y a souvent un

contrat cadre qui définit l’essentiel des relations commerciales c’est à dire le prix et le volume annuel de bière et tous les trimestres les parties concluent des conventions d’application qui vont permettre au bar de s’approvisionner régulièrement pour le trimestre à venir. On retrouve ce type de contrat dans les relations entre les stations de services et les compagnies pétrolières.


c) les promesses de contrat On distingue trois types : • Le pacte de préférence La Première forme est le pacte de préférence Dans le pacte de préférence : une partie que l’on appelle le promettant s’engage envers une autre partie, le bénéficiaire, à conclure ultérieurement un contrat par préférence à d’autres personnes : les tiers. C’est une clause par laquelle une personne s’engage envers une autre à lui proposer, en priorité, la conclusion d’un contrat donné le jour où elle se déciderait à le passer. Ce pacte se retrouve dans les sociétés commerciales par ex : un actionnaire, s’engage de la manière suivante : s’il décide de céder ces actions, il s’engage à les proposer en priorité à un ou plusieurs autres actionnaires qu’il a lui-même désignés dans sa promesse. Arrêt du 15 janvier 2003 la Cour de Cassation a indiqué que le pacte de préférence est valable même s’il ne prévoit aucun prix ni aucun délai pour conclure le contrat définitif. La question qui se pose est de savoir ce qui se passe si le promettant contracte avec un tiers en méconnaissance de son engagement. La sanction sera des dommages et intérêts : le bénéficiaire obtiendra des dommages et intérêts de la part de celui qui a violé l’engagement de préférence. Est-ce que le bénéficiaire peut faire annuler le contrat ? Il peut obtenir l’annulation du contrat à condition de démontrer que le tiers avait connaissance du pacte de préférence et qu’il avait connaissance de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir.

• La promesse unilatérale de vente « Convention par laquelle une personne (le promettant)s’engage à vendre à une autre (bénéficiaire) un bien. » Le bénéficiaire de la promesse a l’option soit d’acheter soit de renoncer à la vente.

*La PUV se distingue de l’offre de contrat qui n’est pas un contrat mais un simple engagement unilatéral de volonté. Mais la différence fondamentale est que l’offre est révocable à tout moment alors que la PUV est en principe irrévocable. *La PUV doit être distinguée du pacte de préférence : la différence fondamentale est que dans le pacte le promettant ne s’est pas d’ores et déjà engagé à vendre.

a) Les conditions de validité La promesse est soumise aux conditions de fond habituelles d’un contrat.

b) Les effets de la promesse Ø Avant la levée de l’option La vente n’est pas encore formée, le bénéficiaire de la promesse n’est pas titulaire d’un droit réel sur le bien mais simplement d’un droit de créance contre le promettant. Ce droit de créance peut être cédé par le bénéficiaire à un tiers et la promesse contient souvent une clause accordant une faculté de substitution au profit d’un tiers. Le promettant est, quant à lui, obligé comme s’il avait déjà vendu et ce depuis la conclusion de la promesse.

*Pendant combien de temps le promettant doit-il tenir sa promesse ? La promesse est consentie pour une durée déterminée, si la promesse est consentie à durée indéterminée la règle en principe est que le promettant est tenu pendant 30 ans. La jurisprudence permet au promettant de mettre en demeure le bénéficiaire d’opter après un délai raisonnable.

*Que ce passe –t-il si le promettant vend le bien à un tiers dans cette période d’attente où il est normalement engagé ? Pour autant le promettant ayant violé sa promesse engage sa responsabilité contractuelle et sera redevable à l’égard du bénéficiaire comme dans le pacte de préférence, le bénéficiaire peut également demander la nullité de la vente, si le tiers était de mauvaise foi c'est-à-dire s’il connaissait l’existence de la promesse.

*Quelle est la sanction lorsque le promettant rétracte sa promesse avant la levée de l’option ? Sur ce problème la Jurisprudence a rendu une décision importante de la Cour de cassation de 1993 ou la cour énonce qu’en cas de rétractation la seule sanction est l’allocation de dommages et intérêts.

Ø Lors de la levée de l’option et après la levée de l’option Deux possibilités se présentent : - Soit le bénéficiaire renonce à acheter, dans ce cas il perd l’indemnité d’immobilisation. - Si le bénéficiaire opte pour l’achat, la promesse se transforme en vente, la vente est supposée se former à ce jour (il n’y a pas de formation rétroactive de la vente). Si la vente est formée au jour de la levée de l’option elle n’est bien souvent pas encore achevée pour des raisons : bien souvent cet acte de vente doit être réitéré par un acte notarié qui est nécessaire en matière immobilière. Il est fréquent en pratique que la PUV soit conclue sous plusieurs conditions notamment la condition de l’obtention de prêt ; la vente devient une vente sous condition suspensive d’obtention de prêt : si le prêt est accordé, la vente sera réalisée ; s’il est refusé, la vente est caduque et dans ce cas, le bénéficiaire pourra obtenir restitution de l’indemnité d’immobilisation car l’échec de la vente ne relève pas de sa volonté.

• Les promesses synallagmatiques Art 1589. La promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix. Les parties qui ont signé la promesse sont en principe obligées de signer l’acte authentique qui ne fait qu’entériner leur accord définitif. Ainsi, si l’une des parties refuse de signer, l’autre peut poursuivre l’exécution forcée de la vente et obtenir à cette fin une décision qui constatera la vente et vaudra vente. *Par exception, il peut exister des cas où la promesse de vente ne vaut pas vente car les parties ont inséré une clause au terme de laquelle elles considèrent l’acte réitératif comme étant un élément constitutif de leur consentement. *Il peut arriver que les juges considèrent que des promesses ne valent pas vente ; il s’agit, dans ce cas, d’un simple projet de vente. *Par exception, il peut exister des cas où l’une des parties au contrat ne sera pas obligée de finaliser la vente car la loi lui reconnaît un droit de rétractation c’est à dire de revenir sur son consentement.

C- L’issus des pourparlers Si la négociation aboutit, le contrat est définitivement formé. Si la négociation échoue la question est de savoir si les parties sont tout de même tenues à des obligations. Les parties, même en cas d’échec peuvent être tenues à des obligations notamment obligations de confidentialité et de discrétion qui les empêchent de divulguer toutes les informations qu’elles ont recueillies pendant les négociations sur l’autre partie.





SUJET D’EXAMEN : CAS PRATIQUE

BEN, vendeur de tissus reçoit depuis 2010, des pagnes en coton d'un fournisseur hollandais, M. VAN BUCK, et ceci à raison d'une livraison par trimestre. Chaque fois, M. Ben précise par lettre, la quantité dont il a besoin. Or, le dernier arrivage comporte des lots défectueux et M. Ben décide de ne plus passer de nouvelles commandes à son fournisseur habituel.

Trois mois s'écoulent au cours desquels notre commerçant réussit à trouver un autre fournisseur. Mais la semaine dernière, M. BEN envoie une lettre à VAN BUCK où il lui écrit en substance qu'il ne recevra pas le dernier lot de pagne, mais qu'il accepte de recevoir les robes au prix proposé.

Cinq jours après avoir posté la lettre, M. BEN réalise qu'il n'aurait pas dû accepter l'offre de lot de robes (qui n'est pas encore arrivé).

Désemparé, il vient vous voir. Peut-il valablement renvoyer le dernier lot de pagnes sans les payer ? Peut-il encore annuler la commande du lot de robes ?



RESOLUTION DU SUJET D’EXAMEN

Problème 1 : Le silence dans la formation du contrat

Problème 2 : Le moment de la formation du contrat

I- Le silence dans la formation du contrat

A- La solution de principe

Est-ce que le silence vaut acceptation ?

Le silence ne vaut pas acceptation parce que le silence est équivoque. En appliquant cette solution de principe, en l’espèce, le silence gardé par M. BEN ne vaut pas acceptation des marchandises livrées par M. VAN BUCK. M. BEN peut valablement les renvoyer à son fournisseur bien entendu sans payer le prix. Cette solution de principe connaît des exceptions. Il convient de voir si notre espèce rentre dans l’une d’elles.


B- Les exceptions au principe

Deux types d’exceptions sont retenues : Des exceptions légales et des exceptions jurisprudentielles. C’est cette dernière exception qui nous intéresse ici. Notamment les exceptions tirées de l’acte des relations d’Affaires continuées entre les parties. Dans une telle hypothèse, la jurisprudence décide que le silence gardé par le destinataire de marchandises envoyées à la fin des termes prévus pour les mêmes quantités et pour le prix habituel vaut acceptation desdites marchandises. Bien que dans notre espèce, ces conditions ne sont pas précisées ; Il faut déduire de la non contestation de ces conditions par BEN que les marchandises envoyées par son fournisseur correspondent aux conditions habituelles. En l’espèce, le silence gardé par M. BEN vaut acceptation de la dernière livraison de pagne, d’autant plus qu’ils sont en relation d’affaires depuis une douzaine d’années. Dès lors, M. BEN ne peut valablement retourner les marchandises puisque le contrat est formé sans engager sa responsabilité contractuelle.

Il est donc tenu de payer le prix.


II- Le moment de la formation du contrat

Le problème du moment de la formation du contrat se pose lorsque l’offrant et le destinataire de l’offre sont en des lieux différents. On parle alors de contrat entre absent dont le type même est le contrat par correspondance.

Notre espèce faisant mention d’une offre de robes faite par lettre constitue un cas de contrat par correspondance. Du fait que BEN après acceptation de l’offre veut rétracter celle-ci, il se pose le problème de savoir à quel moment le contrat s’est formé et s’il peut par conséquent se rétracter ou non. Pour répondre à cette question, des critères ont été dégagés par la jurisprudence.


A- Critères de détermination de la date de formation du contrat

Sans entrer dans une énumération exhaustive, il faut retenir que deux critères ont été, en définitive, retenues par la jurisprudence.

D’abord, le critère d’émission selon lequel le contrat se forme au moment de l’expédition de la lettre de l’acceptation de l’offre. En second lieu, le critère de la réception selon lequel le contrat se forme à l’arrivée de la lettre d’acceptation (à la réception) peu importe que l’offrant ait ou non pris connaissance du contenu. Comme on ne peut à la fois appliquer les deux critères après des hésitations, la jurisprudence semble être fixée désormais pour la théorie de l’émission puisque la Cour de Cassation a consacré cette théorie dans son arrêt du 16/01/1981 confirmant ainsi la position qu’elle a prise depuis 1932 : La théorie de l’émission.


B- La solution de l’espèce

Par application de la jurisprudence mentionnée donc de la théorie de l’émission, en l’espèce, le contrat de vente de Robe entre VAN BUCK et BEN est conclu à la date d’expédition de la lettre d’acceptation de BEN. En d’autres termes, le contrat est formé il y’a 5 jours par rapport à la date où M. BEN veut se rétracter. BEN ne peut valablement décommander les Robes.



Indications pour le cas pratique DOSSABADO

Il s’agit de la question du silence dans l’acception du contrat. En d’autres termes, le silence vaut-il acceptation ?

Pour répondre à cette question, il serait judicieux d’apprécier la nature de la relation née entre M. DOSSABADO et la société et apprécier ensuite ses effets (Principe et exception) d’après les principes dégagés par la loi et la jurisprudence en la matière.

De la nature de la relation entre M. DOSSABADO et la société

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