LE PRINCIPE DE LA LÉGALITÉ EN DROIT ADMINISTRATIF GÉNÉRAL
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LE PRINCIPE DE LA LÉGALITÉ EN DROIT ADMINISTRATIF GÉNÉRAL

VERSION RÉSUMÉE DE COURS

I- Signification du principe de la légalité

A- L’Obligation du respect du Droit par l’administration

L’administration est tenue de se conformer aux règles qui lui sont supérieur. De plus elle est tenue de respecter ses propres règles.

1- Le respect des règles supérieur

L’administration est tenue de respecter les règles supra administratives ou légales : Arrêt Compagnie France Amérique (CACS 4 Décembre 1964)

2- Le respect des règles administratives.

*L’administration est tenue de se conformer à ses propres règles c'est-à-dire à ses propres décisions /

*L’administration doit respecter les règles de caractère général de ses subordonnés quand elle édicte des actes individuels/

B- Le respect du Droit assuré par l’administration

1- L’exécution de la loi et des décisions de justice

*Obligation de l’administration de faire respecter le droit ou la loi : Arrêt Doublet CE 23 octobre 1959

*L’administration dispose de certaines libertés d’appréciation c'est-à-dire d’une marge de discrétion (choix du moment et des moyens de son intervention) : Société Mutualiste des professions libérales.

*Obligation d’exécution des décisions de justice sous peine d’engager sa responsabilité : Arrêt Couitéas (CE 30 Novembre 1923)

2- L’obligation pour l’administration de mettre fin aux situations illégales

*L’obligation pour l’administration de mettre fin aux situations illégales : Arrêt Société Pour L’esthétique De La France (Ce 14 Décembre 1951)

II- Les sources du principe de la légalité

Les ordonnances source du principe de la légalité

A- Conditions de mise en œuvre

1- Condition relative à l’autorisation parlementaire

- Obligation du Président de la République d’obtenir l’autorisation du parlement : loi d’habilitation

- Indication dans les projets de demande, de la finalité, domaine des mesures à prendre et le délai pendant lequel les ordonnances seront pris avant lequel le projet de loi de ratification sera prise

2- Procédure d’édiction

- Les ordonnances sont prises en conseil des ministres après avis éventuel du Conseil constitutionnel

- Délai de la loi d’habilitation pour le dépôt de projet de loi de ratification

B- Régime juridique des ordonnances

1- Pendant le délai d’habilitation

- Dessaisissement du parlement

- L’acte pris par le Président de la république ne peut être censuré par le juge Administratif

2- Après l’expiration délai

- Dessaisissement du Président de la république

- Option du parlement

*Le respect des droits de la défense est un principe général de droit qui commande l’observation d’une procédure contradictoire préalable à une décision revêtant le caractère d’une sanction : Dame Trompier-Gravier

III- La portée du principe de la légalité

A- La sanction de l’acte illégal

La sanction du non-respect de la légalité est constituée par la nullité de l’acte jugée illégal.

N.B : dans le cadre du contrôle de légalité, l’acte peut être qualifié d’inexistant. Cf Doyen Wodié, « l’inexistence des actes juridiques unilatéraux en Droit administratif français. » A.J (actualité juridique 1969 page 76).

*La sanction de l’atteinte au principe de la légalité est l’inexistence de l’acte administratif : Lafite/Rosan Girard/Megevand

1- Le contrôle du juge

a- Le contrôle normal

-La légalité externe

· L’incompétence ou l’illégalité relative à l’auteur de l’acte

Il peut s’agir d’une incompétence quant à l’auteur de l’acte lui-même (compétence rationae personae), quant au délai durant lequel l’autorité agit (compétence rationae temporis), quant au lieu dans lequel l’autorité agit (compétence rationae loci)

· Le vice de forme ou l’illégalité relative à la forme de l’acte

C’est l’omission ou l’irrégularité des formalités auxquelles est soumise l’édiction de l’acte administratif. Le juge distingue entre les formalités substantielles et les formalités non substantielles. Les premières doivent absolument être respectées contrairement aux secondes.

-La légalité interne

· Le détournement de pouvoir ou l’illégalité relative au but de l’acte

Deux types de détournement de pouvoir peuvent être distingués.

*Il y a détournement de pouvoir lorsque l'administration détourne sa compétence à des fins autres que l'intérêt public ou à des fins d'intérêt public qui ne sont pas celles prévues par les règles en vigueur.

*Il y a détournement de procédure lorsque l'administration fait usage d'une procédure administrative à des fins qui ne sont pas celles qui étaient assignées par la loi.

· La violation de la loi ou l’illégalité relative aux motifs de l’acte

Il s’agit du contrôle des raisons justifiant que l’administration ait pris la décision en question.

Certains de ces motifs sont des motifs de fait, d’autres sont des motifs de droit.

*La première erreur, c’est l’erreur de fait. Plus précisément, c’est la violation directe de la loi, c'est-à-dire la violation de l’une des règles qui s’imposait à l’administration au moment de la prise de décision.

*L’autre erreur, c’est l’erreur de droit. Il s’agit d’une mauvaise interprétation de la règle.

Non pas de sa violation directe, mais d’une incompréhension de cette règle ou bien, du choix d’une mauvaise règle. Elles constituent une erreur sur les motifs de droit, donc une violation de la loi au sens des ouvertures des recours pour excès de pouvoir.

b- Le contrôle minimum

Lorsque l’administration dispose d’un pouvoir discrétionnaire le juge procède à un contrôle plus réduit. Il ne contrôle pas les motifs. Il laisse donc l’administration bénéficier d’un entier pouvoir d’appréciation. Toutefois, le juge a développé deux théories qui viennent limiter dans certains cas les pouvoirs de l’administration.

-L’erreur manifeste d’appréciation

C’est une dérogation à la règle selon laquelle, en matière de pouvoir discrétionnaire, l'appréciation de la valeur justificative des motifs est laissée à l'administration et échappe au contrôle du juge.

La disproportion entre les faits et les motifs de la décision est telle que le juge se reconnaît le droit de substituer son appréciation à celle de l’administration. Cette théorie de l’erreur manifeste d’appréciation s’est notamment développée dans le cadre de la fonction publique : avancement (CE Sect, 22 février 1963, Maurel), notation (CE Sect, 23 octobre 1979, Leca), sanctions disciplinaires (CE Sect, 9 juin 1978, Sieur Lebon). L’erreur manifeste d’appréciation s’est aussi développée en matière police des étrangers : (CE Ass, 2 novembre 1973, Sté Librairie Maspéro) ou encore (CE, 3 février 1975, Ministère de l’intérieur/

Pardov). Enfin, le domaine de l’urbanisme est également devenu un terrain d ‘élection de la théorie : (CE Ass, 29 mars 1968, Société du lotissement de la plage de Pampelonne)

-La théorie du bilan

Le juge de l'excès de pouvoir apprécie dans certains cas de pouvoir discrétionnaire si la mesure attaquée n’est pas disproportionnée, excessive, par rapport aux motifs de fait qui l’ont inspirée. C’est ce que l’on appelle le contrôle du « bilan coût-avantages ».

Cette jurisprudence a pris naissance en matière d’expropriation pour cause d’utilité publique. Elle permet au juge de l’excès de pouvoir d'apprécier si, dans l'expropriation projetée, « les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d’ordre social que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu’elle présente ».

(CE, 28 mai 1971, Ville nouvelle Est ; 20 octobre 1972, Sté civile Sainte Marie de l’Assomption)

2- La nullité de l’acte illégal

L’acte illégal est sensé n’avoir jamais existé dans la mesure où il ne remplit pas les conditions posées par la loi pour être valide. L’acte sort donc de l’ordonnancement juridique. A cet effet, on dit qu’il y a nullité de l’acte.

Disparition ad initio de l’acte.

B-Les limites au principe de légalité

1- Les limites en période normale

a- Le pouvoir discrétionnaire

-Approche définitionnelle

-Opposition à la compétence liée

b- Les actes de gouvernement

· Les principes

*Les actes de Gouvernement correspondent aux actes des autorités administratives qui ne sont susceptibles d’aucun recours, tant devant les tribunaux administratifs que les tribunaux judiciaires (Arrêt Rubin des Servens).

*Ce qui caractérise l’acte de Gouvernement à cette époque est le mobile politique de l’acte. Par exemple, en 1822, le Conseil d’Etat qualifie de la sorte une décision du ministre des finances au motif que, intéressant le statut de la famille Bonaparte, elle touche à une question relevant exclusivement du Gouvernement (CE, 1/05/1822, Laffitte).

*Suite au bouleversement induit par la loi de 1872 opérant le passage de la justice retenue à la justice déléguée, le Conseil d’Etat abandonne le critère tiré du mobile politique (CE, 19/02/1875, Prince Napoléon). Désormais, au terme des analyses du professeur Chapus, les actes de Gouvernement sont ceux « qui apparaissent comme des actes politiques en raison des matières dans lesquelles ils sont accomplies ». Cette nouvelle définition réduit considérablement le domaine des actes du Gouvernement. Cette nouvelle définition substitue à un critère subjectif, l’intérêt politique, un critère objectif lié à la nature de la matière traitée.

Actes internes :

- Les actes relatifs aux relations avec le parlement :

*Les actes de collaboration à l’élaboration des lois, initiative des lois (CE 17 février 1888, Prévost Rec. 149) décret de promulgation des lois (CE 7 novembre 1933, Desreumaux, S. 1934, 3.9).

* Les actes relatifs au déroulement des élections parlementaires (Actes de convocation du corps électoral pour des élections législatives CE 8 juin 1951. Herschowitz S. 1951, 3.74). En France, le conseil d’Etat a admis la recevabilité des décrets non règlementaires relatifs aux élections parlementaires (CE 11 juin, 1981 F. Delmas, ADJA 1981, 357).

*En France, des décisions du président de la République : il en va ainsi de la décision de recourir au referendum (CE 19 octobre 1962, Brocas RDP 1962, 1081) et de la décision de mettre en œuvre l’article 16 de la constitution (CE 2 mars 1962, Rubin de Servens, RDP 1962, 288).

Actes externes :

- Les actes relatifs aux relations internationales :

Ces actes touchant aux rapports du gouvernement avec les gouvernements étrangers et un sujet de droit international en général, le juge s’interdit tout contrôle sur de tels actes. Il en va ainsi :

*Des actes relatifs à la conclusion des traités internationaux : signature, adhésion, ratification, dénonciation (CE 5 août 1921, Goffart, Rec., 833, CE 27 juin 1958, Georger, Rec., 403).

*Des actes accomplis dans le cadre des relations diplomatiques, exercice de la protection diplomatique ou saisine d’une juridiction internationale.

Toutefois, le juge exerce son contrôle, lorsque l’acte pose des problèmes de droit interne, qui ne mettent pas en cause les relations avec l’étranger. Il recourt alors à la notion d’acte détachable des rapports internationaux.

· Le régime juridique des actes de gouvernement

Les actes de Gouvernement bénéficient d’une totale immunité juridictionnelle, tant devant les juridictions administratives que devant les juridictions judiciaires. Elle se traduit dans les arrêts par différentes formules telles que « la requête doit être rejetée comme portée devant une juridiction incompétente », ou encore « la décision n’est pas détachable de la conduite des relations internationales ». Cette immunité s’explique par le fait que le juge ne souhaite pas interférer soit dans les rapports constitutionnels entre pouvoirs publics, soit dans la conduite des relations internationales. La caractéristique d’un tel acte est précisément qu’il n’est susceptible d’aucun recours contentieux, que ce soit le contentieux de la légalité ou de l’interprétation ou celui de la responsabilité. (CE 9 janvier 1952, Gény précité).

*Le contentieux de la légalité : le recours en annulation pour excès de pouvoir est irrecevable contre les actes de gouvernement. Il en va de même de l’exception d’illégalité.

*Le contentieux de l’interprétation des traités : appartient, plus précisément au ministre des affaires étrangères, sauf application de la théorie de l’acte clair.

*Le contentieux de la responsabilité : les actions de responsabilité dirigées contre l’acte de gouvernement sont irrecevables. Les conséquences dommageables d’un tel acte ne peuvent donc donner lieu à réparation.

c- Les mesures d’ordre intérieur

Pendant longtemps la juridiction administrative a refusé de connaître de certaines mesures prises dans le cadre de l’activité interne de l’administration parce que l’on considérait que ces mesures n’étaient pas très importantes et qu’il fallait laisser à l’administration une certaine marge de manœuvres dans le cadre de cas d’activités courantes. Il ne fallait pas affaiblir l’action de l’administration par des recours dans ces domaines jugés peu ou moyennement importants. En réalité la jurisprudence a évolué en ce qui concerne ces mesures.

Quand elles ont des incidences sur le statut des personnes concernées ou quand elles peuvent entraver l’exercice d’une liberté publique. Pendant très longtemps les juges ont considéré que les sanctions disciplinaires prononcées dans certaines circonstances étaient insusceptibles de recours.

Infligée à un militaire de carrière constituait certes une mesure d’ordre intérieure mais susceptible de recours puisque cette mesure affectait le statut, l’avancement de l’intéressé.

Autre exemple : dans le milieu carcéral, la jurisprudence a considéré pendant très longtemps que la décision prise par le directeur d’une maison d’arrêt de placer un détenu en punition de cellule, ce qui équivaut à la privation d’un certain nombre de droits à l’intérieur de la maison d’arrêt, la jurisprudence a décidé pendant très longtemps que cette décision était d’ordre intérieur non susceptible de recours.

Dans un arrêt du 17/02/95, l’arrêt Marie, le conseil d’Etat avait considéré qu’il s’agissait d’une décision susceptible d’être déférée au juge de l’excès de pouvoir (le juge de l’annulation).

La jurisprudence a également considéré dans le statut de la fonction publique que toutes les punitions disciplinaires prisent contre les agents ayant des effets sur leur rémunération, leurs attributions ou leur statut constituait des mesures d’ordre intérieur qui étaient susceptibles d’un recours devant le juge administratif.

Dans le domaine scolaire, des sanctions disciplinaires prisent contre des élèves (exclusion d’une classe par exemple, interdiction de participer à un examen suite à une fraude), ces mesures constituent des mesures d’ordre intérieur elles sont aussi susceptibles de recours contentieux dans la mesure où ces décisions peuvent affecter le statut juridique des personnes concernées.

Pendant très longtemps, la jurisprudence a considéré que les règlements intérieurs des assemblées locales (conseil général,…) n’étaient pas susceptibles d’être attaqués devant le juge administratif puisqu’on était en présence de mesures d’ordre intérieur. C’est la loi du 6/02/1992 sur les assemblées locales qui a autorisé formellement le recours contentieux contre les règlements intérieurs des assemblées locales.

Pendant longtemps, le juge a refusé de les contrôler car il les considérait comme peu importantes et ne voulait pas affaiblir la discipline militaire en ouvrant au juge la possibilité de recours concernant la discipline dans les collèges, prisons ... Aujourd’hui le contrôle du juge augmente sur ces mesures si elles ont une certaine gravité et qu’elles ont un effet direct sur l’exercice d’une liberté publique.

Arrêt HARDOUIN du CE du 17 février 1995 sur le contrôle de la mise en arrêt d’un prisonnier.

Arrêt MARIE du CE du 17 février 1995 sur le contrôle du juge sur la punition de cellule qui constitue désormais une mesure d’ordre intérieur.

Si l’Administration se doit de respecter l’ensemble des règles composant le principe de légalité, il arrive que celui-ci fasse l’objet de certaines inflexions. Ainsi, certains actes, tels que les actes de gouvernement ou les mesures d’ordre intérieur, sont soustraits au contrôle du juge administratif. L’Administration est donc libre d’y inscrire les principes qu’elle souhaite.

d-Les actes préparatoires

2-Les limites en période exceptionnelle

Ces circonstances ont pour effet de soustraire l’administration au respect de la légalité. Elles mettent la légalité en « vacances » et lui « substituent une légalité d’exception », une légalité de crise.

Ces circonstances, par des textes particuliers ont été étendues à d’autres domaines par le juge, qui a construit une véritable théorie des circonstances exceptionnelles.

a- Les limites prévues par la loi

Les textes organisant des circonstances exceptionnelles sont tantôt constitutionnels, l’état de crise de l’article 73 de la constitution, tantôt législatif, et concernent l’état de siège, l’état d’urgence et d’autres mesures de police.

· Etat de crise

Article 73 de la constitution de 2016 : Lorsque les Institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux sont menacées d’une manière grave et immédiate, et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend les mesures exceptionnelles exigées par ces circonstances après consultation obligatoire du Président de l’Assemblée Nationale, du Président du Sénat et du Président du Conseil Constitutionnel.

*Conditions de l’état de crise : …

*Effets : L’article 73 de la constitution autorise le président de la République à exercer tout seul la totalité des pouvoirs publics. Il devient à la fois législatif et exécutif.

Cette dictature temporaire se substitue ainsi à la légalité normale, dominée par le principe de la séparation des pouvoirs sanctionné par la constitution. Elle permet au chef de l’exécutif d’intervenir aussi bien dans son domaine que dans celui du législatif.

· Etat de siège

Il a été organisé par les lois du 9 août 1849 et 3 avril 1878, rendues applicables en côte d’ivoire par le décret du 30 décembre 1916 et modifiées par la constitution. Ces textes prescrivent les conditions d’application et les effets attendus.

Article 105 de la constitution de 2016 : L’état de siège est décrété en Conseil des Ministres. L’Assemblée Nationale se réunit alors de plein droit si elle n’est en session. La prorogation de l’état de siège au-delà de quinze jours ne peut être autorisée que par le Parlement ;…

Les conditions d’application : on en distingue deux : l’une de fond et l’autre de forme.

*Au fond : l’état de siège n’est déclaré qu’en cas de péril imminent pour la sécurité intérieure et extérieure de l’Etat.

*En la forme : il est décrété en conseil des ministres. Mais une loi doit autoriser son maintien au-delà de 15 jours.

Le Parlement, composé de deux chambres, qui se réunit en plein droit, si elle n’est pas en session, se prononce dans ce cas, à la majorité simple des membres en fonction.

Les effets sont essentiellement de deux ordres : compétences des autorités militaires avec des pouvoirs étendus. Il y’a :

*Le transfert à l’autorité militaire des pouvoirs de police exercés en période normale par l’autorité civile.

*L’élargissement considérable des pouvoirs de police. Ainsi, deviennent légales des mesures de police interdites aux autorités de police en période normale : perquisition de jour et de nuit, interdiction de publication, extension des compétences des juridictions militaires à des infractions qui relèvent normalement de la compétence des juridictions répressives ordinaires.

· Etat d’urgence

Il est institué par la loi n°59-231 du 7 novembre 1959 (JO 1959, 1072).

Ce texte prévoit également ses conditions d’application et ses effets.

Les conditions d’application : on en distingue également deux dont l’une de fond et l’autre de forme :

*Au fond, il est déclaré soit en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public, soit en cas d’évènement, qui de par leur nature ou leur gravité, sont susceptibles d’entraver la bonne marche de l’économie ou les services publics d’intérêt social.

*En la forme, il est déclaré par un décret, qui fixe sa durée et détermine les parties du territoire visées.

Les effets : l’état d’urgence a pour effet de conférer au ministre de l’intérieur des pouvoirs de polices exceptionnellement étendus. Celui-ci peut notamment :

Interdire par arrêté la circulation des personnes ou des véhicules dans des zones déterminées à des heures fixes.

Interdire des réunions de nature à provoquer ou a entretenir le désordre.

Ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacles, débits de boissons et lieux de réunions dans les zones déterminées…

· Réquisitions

Elle permet l’utilisation des personnes en vue d’assurer certains services.

b- Les limites prévues par la jurisprudence

Dans certaines hypothèses qui sont tout à fait exceptionnelles, comme une grève ou la guerre, l’administration est tout de même obligée d'agir, mais le juge tolère que dans ces circonstances, l’administration se dispense du respect de certaines règles. Il s’agit d’un assouplissement de la légalité qui ne la fait pas disparaître pour autant. Trois arrêts importants ont consacré cette théorie : CE, 28 juin1918, Heyriès, CE, 28 février 1919, Dames Dol et Laurent et enfin TC, 27 mars 1952, Dame de la Murette.

· La notion

Dans certaines situations l’administration peut prendre certaines mesures.

- Les situations

Trois conditions doivent être réunies pour qu’il y ait circonstances exceptionnelles : Arrêt Laugier

*D’abord une situation de fait extrêmement grave sur tout ou partie du territoire de la république.

On peut définir les circonstances exceptionnelles comme la survenance brutale d’évènements graves et imprévus s’analysant comme une extension temporaire des compétences normales de l’administration dans la mesure nécessaire pour permettre la poursuite du fonctionnement des services publics en présence de faits ou de situations exceptionnelles. Ces faits peuvent consister :

-En une guerre

-Une grève générale d’une grande ampleur

-Des situations de catastrophes naturelles sans précédent comme : un tremblement de terre, une éruption volcanique…

*En second lieu, cette situation doit rendre impossible l’observation stricte de la légalité ordinaire.

*Enfin, ces circonstances doivent être largement indépendantes de la volonté des pouvoirs publics.

- Les mesures

*Les mesures prises doivent être strictement limitées à ce qui est nécessaire à la sauvegarde de l’ordre public et de l’intérêt national.

*D’autre part, elles doivent être limitées dans le temps à la période durant laquelle les circonstances les justifient.

· Les conséquences

- L’administration peut aller au-delà des règles de forme

*Le dépassement des règles de compétence

Ainsi, en 1944 à la suite du débarquement, des mesures de la compétence du législateur ont été prises par circulaire. (CEAss, 16 avril 1948, Laugier)

ARRET HEYRIES (CE 28 Juin 1918) : Circonstances exceptionnelles ; effets : atteintes aux règles de compétence et de droit de communication du dossier.

En raison des circonstances exceptionnelles, l’administration peut suspendre par règlement l’application d’une loi, ce qui est illégal en période normal car la loi est au-dessus des décrets. L’administration peut donc intervenir dans le domaine législatif en circonstances exceptionnelles.

ARRET MARION (CE 05 Mars 1948) : Effets des circonstances exceptionnelles (atteintes aux règles de compétence ; théorie du fonctionnaire de fait).

En principe, des particuliers ne peuvent pas édicter des actes administratifs du fait des règles de compétence. Cependant, en raison des circonstances exceptionnelles, il y’a atteinte aux règles de compétence : ainsi des mesures édictées par de simples particuliers sont considérées comme des actes administratifs, en application de la théorie du fonctionnaire de fait.

La théorie du fonctionnaire de fait est un assouplissement jurisprudentiel des règles de compétence relatives à l’édiction des actes administratifs permettant de considérer comme valables certains actes malgré l’incompétence objective de leur auteur, en se fondant soit sur la nécessité de la continuité du service public, soit sur l’apparence vraisemblable aux yeux du public de leur qualité pour agir.

*Le dépassement des règles de procédure

Pendant la période de guerre la règle de la communication du dossier avant toute mesure disciplinaire peut être écartée. (CE, 28 juin 1918, Heyriès)

- L’administration peut aller au-delà des règles de fond

*Des décisions de police restreignant les libertés individuelles au-delà des limitations que peut ordinairement édicter la police administrative sont légales (CE, 6 août 1915, Delmotte et Senmartin 1916, CE, 28 février 1919, Dol et Laurent)

ARRET DAME DOL ET LAURENT (CE 28 Février 1919) : Circonstances exceptionnelles ; atteintes à la liberté individuelle et à la liberté de commerce et de l’industrie.

ARRET DAME DE LA MURETTE (TC 27 Mars 1952) : Circonstances exceptionnelles ; effets : atteintes graves et arbitraires à la liberté individuelle (arrestations et internement). En raison des circonstances exceptionnelles, les atteintes graves et arbitraires portées à la liberté des personnes par l’administration ne constituent pas une voie de fait susceptible de justifier la compétence des juges judiciaires

*Les atteintes qualifiées habituellement de «voies de fait» et soumises à ce titre à un régime juridique spécial deviennent des actes administratifs ordinaires soumis au contrôle de légalité normal (TC, 27 mars 1952, Dame de la Murette)

*Des décisions administratives refusant d’exécuter un jugement en raison des risques de désordres graves que pourrait entraîner cette exécution sont légales (CE, 30 novembre 1923, Couitéas).


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