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LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DE L'INFRACTION D'EMPOISONNEMENT EN DROIT IVOIRIEN

Au terme de l'art. 378-4° CP, l'empoisonnement est tout attentat à la vie d'une personne par l'effet de substances qui peuvent donner la mort plus ou moins promptement, de quelque manière que ces substances aient été employées ou administrées et quelle qu'en ait été les suites.


L’empoisonnement est une infraction formelle. L’évènement qui déclenche la répression n’est pas la mort de la victime mais le simple emploi ou la seule administration de substances mortifères.

§ 1 – L’incrimination


A/ La condition préalable : nature du produit utilisé

L’empoisonnement est un meurtre qui est commis non pas par des coups et blessures, mais par le moyen d’une substance de nature à entraîner la mort. Ce qui est important dans la qualification de cette infraction c’est la nature du produit. Le produit doit être mortifère : c’est donc une substance qui est susceptible de donner la mort.



Ce caractère mortifère sera apprécié non pas en fonction de la résistance plus ou moins grande de la victime, mais in abstracto, c’est-à-dire, en fonction de l’état du produit donné : soit par sa qualité qui le rend mortifère, comme un poison par exemple, soit par son mélange avec d’autres produits, soit par sa quantité, comme le fait d’administrer sur une longue période des doses, qui, prises isolément, ne sont pas mortelles.


Les juges du fond apprécieront souverainement ce caractère mortifère de la substance administrée ; dans la pratique, on fera appel à l’expertise des médecins par exemple, pour déterminer la nature mortifère du produit.


L’exigence du caractère mortifère de substances distingue l’empoisonnement de l’administration de substances nuisibles qui est de nature à porter atteinte à l’intégrité de la victime et non à sa vie (cf.article 385 cp).


B/ L’élément matériel : le mode d’administration

Infraction de commission, l’élément matériel est constitué par un acte positif d'emploi ou d’'administration d'une substance susceptible de donner plus ou moins promptement la mort.

Divers procédés d’emploi ou d’administration sont ainsi incriminés : ingestion, absorption, inhalation, une imprégnation par la peau, et autres etc.

De plus, il importe peu qu’il soit administré par la personne qui a préparé le poison. L'administration peut faire intervenir la victime elle-même (pour simuler un suicide par exemple, voir Crim. 8 juin 1993, Gaz.Pal. 1993-456), ou une tierce personne ignorant le dessein criminel (ex: nourrice, etc.) : dans ce cas, le tiers de bonne foi n’est pas poursuivi, l’individu ayant fourni la substance au tiers étant l’auteur principal. Néanmoins, si le tiers qui administre la substance est de mauvaise foi, le tiers est l’auteur principal, la personne ayant fournie la substance devenant un complice (Crim. 2 juillet 1886, Bull. Crim. n° 238).

L’administration doit être exercée sur la personne d’autrui. Cela concerne donc tout être humain qui n’est pas soi-même. Il faut donc une personne humaine (exclusion des fœtus ou des animaux), vivante (et qui soit autrui (impunité d’un empoisonnement sur soi, c’est-à-dire d’un suicide) même si la victime n’est pas déterminée.


Le consentement de la victime n’est pas pris en compte (euthanasie). D’ailleurs, il faut souligner l’indifférence des mobiles (mettre fin à des souffrances, vengeance, etc.).


C/ L’élément intentionnel

L’élément moral de l’empoisonnement suppose :

- un dol général : l’agent doit avoir la connaissance du caractère mortel de la substance administrée ;

- un dol spécial : l’animus necandi, l’agent doit avoir eu l’intention de donner la mort.


Sur la base de cette intention homicide, les juges ont refusé, dans divers cas de transmission comme dans l’affaire du sang contaminé, d’appliquer la qualification d’empoisonnement du fait que l’intention de tuer fait défaut ; idem dans le cas de la transmission du sida : les personnes conscientes d’être malades ont caché leur séropositivité à leur partenaire pour ne pas se protéger, sans pour autant désirer la mort de leur partenaire.


§ 2 – La répression

A/ le régime juridique


L’empoisonnement est une infraction formelle : ainsi, il est constitué/consommé par l’attentat lui-même, c’est-à-dire, par l'absorption du poison, peu importe que la victime ait ou non succombé. La mort de la victime n'est donc pas un élément matériel de l'infraction.


Il est également indifférent qu'après avoir administré la substance toxique, l'agent, éprouvant un remords, ait fait absorber à la victime un contrepoison ou l’antidote (inefficacité du repentir actif).


La tentative d’empoisonnement est aussi punissable. L’empoisonnement étant un attentat, sa tentative intervient plus tôt sur l’iter criminis que s’agissant des infractions matérielles. C’est pourquoi, par exemple, la chambre criminelle de la Cour de cassation a pu considérer, dans un arrêt du 5 février 1958, que le fait de jeter du poison dans un puits, constitue une tentative d’empoisonnement, alors même que la victime ne boit pas l’eau du puits (l’inculpé avait jeté une quantité d’arsenic dans l’eau du puits des voisins, produit de nature à provoquer la mort après des absorptions répétées). En revanche, acheter le poison constitue incontestablement un acte préparatoire.


Concernant la prescription, le point de départ de la prescription décennale de ce crime se situe au jour où les substances mortelles sont administrées (Versailles, 7 avril 1998 : BICC 1999, n° 267).


B/ les peines encourues

Article 379: Est puni de l’emprisonnement à vie quiconque commet un (…), un empoisonnement ou se rend coupable du crime de castration ou de stérilisation.

Par ailleurs, aux termes de l’Article 387 cp, la personne reconnue coupable de crime d’empoisonnement peut être :

1° condamnée à l'interdiction de paraître en certains lieux pendant une période déterminée ;

2° privée de droits, tel le droit d’être nommé juré, assesseur ou expert, le droit d’être nommée aux fonctions de l’administration publique etc.

3° déchue de l’autorité parentale, s'ils sont les père ou mère de la victime.


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