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CAS PRATIQUE DROIT PENAL (CAS DE M. TOUCOULEUR)


M. TOUCOULEUR, directeur commercial de la société NANHOUONWOU vient d’être mis aux arrêts par les éléments de la police économique du plateau alors qu’il apprêtait à organiser l’anniversaire de son nouveau-né SINFETEH REINE.

Déféré au Parquet du Tribunal de première Instance d’Abidjan, le dossier d’enquête préliminaire révèle les faits suivants :

Depuis le 12 décembre 2015, aucun salaire n’a été payé et le total des salaires dus aux employés de ladite Société s’élève à plus de 3.000.000F CFA. Alors que le contrat liant la société audit Directeur lui interdit de disposer des fonds de la société NANKOUONWOU au-delà de 2.000.000FCFA, il prit l’initiative de payer les arriérés de salaire. C’est ainsi que le 10 juillet dernier, M. TOUCOULEUR, après avoir encaissé un chèque d’un montant de 4.000.000F CFA dont la société est bénéficiaire, paya tous les salaires impayés et pour lesquels lesdits employés menaçaient d’entrer en grève.

1- Quelle infraction peut-on reprocher au directeur commercial ?

2- Peut-il être jugé par la procédure de flagrant délit sachant qu’interrogé devant l’autorité de police, M. TOUCOULEUR a soutenu n’avoir commis aucune infraction au motif qu’en sa qualité de directeur commercial, il était habilité à encaisser les chèques émis au nom de la société et mieux, à payer les employés indomptables ?

3- Alors qu’aucun juge d’instruction n’a été saisi, le Procureur de la République près le tribunal de première instance d’Abidjan, après avoir interrogé le suspect sur son identité, le plaça sous mandat de dépôt en décernant un ordre d’incarcération provisoire. Comment appelle-t-on cette détention ?

Ladite détention est-elle justifiée en l’état actuel de la procédure pénale ivoirienne ?

Supposons qu’un juge d’instruction ait été saisi par un réquisitoire du Procureur de la République, peut-il inculper M. TOUCOULEUR du chef d’abus de confiance ?

Justifiez votre réponse.



PROPOSITION DE RESOLUTION DU CAS PRATIQUE


I- L’infraction reprochable à M. TOUCOULEUR


M. TOUCOULEUR est directeur commercial de la société NANKOUONWOU. En cette qualité, il accomplit des actes juridiques au nom de ladite société. Et c’est en cette qualité qu’il a le pouvoir d’encaisser un chèque pour le compte de la société. En droit, une telle personne est qualifiée de mandataire.

En l’espèce, les statuts et règlements intérieurs de la société lui interdisent de disposer des avoirs au-delà de deux millions de francs. Or il vient d’encaisser la somme de 4millions. Il n’a point reversé cette somme à son mandant, qui est la société. Il n’a donc pas fait raison au mandant du produit du mandat. Il a commis donc un détournement au sens de la loi pénale. On peut pressentir ici sans autre justification, l’infraction d’abus de confiance prévue par l’article 467 du code pénal.


Art. 467. - Constitue un abus de confiance, le détournement, la dissipation ou la destruction, par une personne, au préjudice d’autrui, de fonds, de valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter, d'en faire un usage ou un emploi déterminé. L'abus de confiance est puni d'un emprisonnement d'un à cinq ans et d'une amende de 300.000 à 3.000.000 de francs. L'amende peut être portée au quart des restitutions et des dommages-intérêts, si ce montant est supérieur au maximum prévu à l'alinéa précédent. Dès lors que la preuve de la remise de la chose est rapportée, celui qui l'a reçue est présumé l'avoir détournée, dissipée ou détruite s'il ne peut la rendre, la représenter ou justifier qu'il en a fait l'usage ou l'emploi prévu. Pour faire tomber cette présomption, il lui appartient de prouver que l'impossibilité dans laquelle il se trouve de rendre ou représenter la chose reçue ou de justifier qu'il en a fait l'usage ou l'emploi prévu, n'a pas une origine frauduleuse ou, si cette origine est frauduleuse, qu'elle ne lui est pas imputable.

II- Le jugement de M. TOUCOULEUR selon la procédure de flagrant délit


La procédure de flagrant délit est très loin de l’infraction qualifiée flagrant délit.

Selon l’article 86, en cas de délit flagrant, lorsque le fait est puni d'une peine d'emprisonnement, le mis en cause est déféré devant le procureur de la République qui peut le mettre sous mandat de dépôt, après l'avoir interrogé sur son identité et sur les faits qui lui sont reprochés. Il en est de même en cas de délit puni d'une peine d'emprisonnement qui, à la suite d'une enquête, ne paraît pas devoir faire l'objet d'une instruction préalable, en raison soit des aveux de l'inculpé, soit de l'existence de charges suffisantes. Le procureur de la République saisit alors le tribunal correctionnel suivant la procédure du flagrant délit dans les conditions définies au présent Code. Les dispositions prévues au présent article sont inapplicables si l'information est obligatoire ou si les personnes soupçonnées d'avoir participé au délit sont mineures de dix-huit ans.

En l’espèce, l’infraction reprochée à M. TOUCOULEUR est une infraction de nature correctionnelle passible de peine d’emprisonnement. Le détournement des fonds perçus au titre du mandat étant sans équivoque, il existe des charges suffisantes contre le susnommé, condition qui justifie la poursuite selon la procédure de flagrant délit.


III- De la qualification de la détention de M. TOUCOULEUR


Alors qu’aucun juge d’instruction n’a encore été saisi de l’affaire, le procureur de la république, garant de l’ordre public et protecteur des intérêts généraux de l’Etat et de la société, plaça le mis en cause sous mandat de dépôt après l’avoir interrogé sur son identité et sur les faits qui lui sont reprochés.

Cette détention n’est pas préventive car le juge d’instruction n’est pas encore saisi du dossier de la procédure.

En effet, la détention préventive ne peut être ordonnée que si l'inculpé encourt une peine privative de liberté d'au moins deux ans et ne peut être prononcée ou prolongée que par ordonnance motivée du juge d'instruction démontrant, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à l'un ou plusieurs des objectifs suivants et que ceux-ci ne peuvent être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire pour les cas énumérés à l’article 163 du Code de procédure pénale. Cependant, ce pouvoir de détention est reconnu au Procureur de la République en cas de délit flagrant et lorsque le fait est puni d'une peine d'emprisonnement. Ainsi, le mis en cause est déféré devant le procureur de la République qui peut le mettre sous mandat de dépôt, après l'avoir interrogé sur son identité et sur les faits qui lui sont reprochés.

Dès lors, en l’état actuel de la procédure pénale ivoirienne, cette détention est justifiée car prévue par les termes de l’article 86 du Code de procédure pénale.


IV- La saisine du juge d'instruction


Article 97.- Le juge d'instruction ne peut informer qu'en vertu d'un réquisitoire du procureur de la République, même s'il a procédé en cas de crime ou de délit flagrant.

Le réquisitoire peut être pris contre personne dénommée ou non dénommée. Il doit être motivé lorsque le placement de la personne sous contrôle judiciaire ou en détention préventive est sollicité.

Le juge d'instruction a le pouvoir d'inculper toute personne ayant pris part, comme auteur ou complice, aux faits qui lui sont déférés.

Lorsque des faits, non visés au réquisitoire, sont portés à la connaissance du juge d'instruction, celui-ci communique immédiatement au procureur de la République les plaintes ou les procès-verbaux qui les constatent.

En cas de plainte avec constitution de partie civile, il est procédé comme il est dit à l'Article 107.



Si le juge d’instruction est saisi de cette affaire par un réquisitoire du Procureur de la république, il verra que ledit réquisitoire aura distinctement mentionné les faits suivants :

M. TOUCOULEUR a agi en qualité de mandataire de la société ;

M. TOUCOULEUR a encaissé au titre de ce mandat, des deniers dont la société est bénéficiaire ;

M. TOUCOULEUR n’a pas pu représenter cette somme à ladite société ;

M. TOUCOULEUR a donc commis un détournement au préjudice de la société, sa bonne intention de payer les employés ne saurait le disculper du délit de détournement qui est sans équivoque ici en droit et valablement présumé.

M. TOUCOULEUR tombe ainsi par ses agissements sous le coup de l’article 467 du code pénal :


Le Juge d’instruction qui lira de tels faits présentés au réquisitoire introductif du Procureur de la république, le saisissant, ne peut qu’inculper M. TOUCOULEUR du chef du délit d’abus de confiance conformément à la loi.

Le juge d'instruction a le pouvoir d'inculper toute personne ayant pris part, comme auteur ou complice, aux faits qui lui sont déférés.




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