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INTRODUCTION
L’objectif du cours de théories des relations internationales est de familiariser les étudiants avec les approches théoriques des relations internationales.
I- La nécessité de la théorie des relations internationales
Est-il nécessaire d’élaborer une théorie des relations internationales ? A cette question, certains auteurs répondent par la négative en soutenant l’idée que la nature du domaine considéré se concilie mal avec tout effort de conceptualisation. En d’autres termes, on ne devrait pas réduire la vie internationale à des paradigmes généralement éloignés de la réalité.
L’action politique ne tient pas compte des suggestions de la théorie. Les relations internationales, en tant que champ de l’action de l’Etat, sont du ressort du politique qui, en la matière, ne se préoccupe guère de ce que préconise la théorie.
Une série de critiques sont formulées à l’encontre de la théorie, aussi bien en dehors du monde académique qu’au sein des spécialistes des relations internationales.
A- Les critiques extérieures au monde académique
Deux (2) raisons fondamentales expliquent la tendance du politique a ignoré la théorie dans la conduite de l’action politique.
La première raison réside dansle caractère réducteur de la théorie. Il est indiqué que la théorie ne peut atteindre la globalité, c’est-à-dire son objectif ultime, sans aller au-delà de la particularité de chacun des faits observés. Dans sa quête d’objectivité, le théoricien serait condamné à la subjectivité qui caractérise tout commentateur. Aussi, Richelieu met-il en garde contre la partialité de l’analyse en indiquant qu’« il n’y a rien de plus dangereux pour l’Etat que ceux qui veulent gouverner les royaumes par les maximes qu’ils tiennent de leurs livres ». Il résulte de cette partialité une démultiplication de la théorie, un foisonnement des concepts et paradigmes qui se contredisent.
La deuxième raison concerne le caractère dogmatique de la théorie. Celle-ci véhiculerait une représentation conservatrice du monde. La théorie aurait une vocation hégémonique car elle récuserait tout changement ne s’inscrivant pas dans son cadre explicatif. A travers son contenu, la théorie déforme la vision de l’observateur qui devient prisonnier de ses préceptes.
B- Les critiques formulées par des spécialistes des relations internationales
Certains spécialistes ont renoncé à la formulation des théories des relations internationales du fait des difficultés rencontrées dans cette entreprise.Hans Morgenthaua, tout comme Pascal Blaise, récusé la possibilité d’élaborer une théorie générale tendant à « ériger de simples observations en assertions générales du devenir du monde ». En d’autres termes, il ne peut y avoir une seule théorie des relations internationales ; il existe plutôt plusieurs théories des relations internationales.
II- L’importance des théories des relations internationales
La connaissance des théories est essentielle pour la préparation des concours administratifs comprenant une épreuve de questions internationales.
Les théories offrent des grilles de lecture de la réalité internationale permettant de structurer rapidement la pensée pour l’exposer ensuite aisément. L’importance des théories reposent également sur le caractère éclairant de celles-ci. Les valeurs sur lesquelles les théories sont fondées permettent de comprendre la mentalité des personnes ou des Etats qui choisissent telle ou telle théorie pour conduire leur action ou analyser celle des autres sur la scène internationale. Les analyses développées par tel pays ou tel dirigeant nous renseignent, avant tout, sur les tendances les plus fortes de ces pays ou de ces dirigeants. En cela, elles sont utiles à celui qui cherche à définir une politique étrangère. Par exemple, le tiers-monde a tendance, globalement, à considérer la différence de richesse entre les pays développés et les autres et à estimer que l’insécurité du monde est la conséquence de ce fossé : la paix dans le monde exigerait donc une importante aide au développement des pays les moins avancés.
Pour comprendre la diplomatie d’un Etat, il est important de prendre en considération les valeurs qu’il professe autant que les buts qu’il poursuit. Ceci donne de précieuses indications sur sa manière d’interpréter l’environnement international et donc d’y réagir.
III- La diversité des théories des relations internationales
La théorie des relations internationales est une science humaine ; c’est ce qui justifie qu’elle soit diversifiée. Il résulte des travaux des chercheurs que les relations internationales constituent à la fois un espace de confrontation et de coopération.Les différentes théories se résument donc en deux (2) courants doctrinaux qui s’affrontent.
L’un affirme que les relations internationales sont conflictuelles et compétitives. Il est dénommé « courant conflictuel » (1ère partie). L’autre met en relief la coopération et l’intégration internationale qui caractérisent les relations internationales : c’est le « courant solidariste » (2ème partie). A côté de ces deux courants, l’on assiste à la naissance de nouveaux paradigmes des relations internationales (3ème partie).
1ère partie : LE COURANT CONFICTUEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
L’idée générale de ce courant est que la société internationale est un ensemble dans lequel la loi du plus-fort, la loi de la jungle continue, malgré les progrès, à s’imposer. Le courant conflictuel se subdivise en deux (2) conceptions : la conception réaliste des relations internationales (chapitre 1) et la conception marxiste des relations internationales (chapitre 2).
Chapitre 1 : LA CONCEPTION REALISTE DES RELATIONS INTERNATIONALES
Le qualificatif « réaliste » désigne les auteurs qui prétendent considérer humain et les rapports sociaux, notamment les relations politiques, tels qu’ils sont et non tel que l’on voudrait qu’ils soient. C’est la conception la plus ancienne et sans doute la plus répandue. Elle se subdivise en deux (2) courants : le réalisme classique et le néoréalisme.
Section 1 : LE REALISME CLASSIQUE
Le réalisme classique peut être appréhendé à travers les nombreux concepts et thèses qu’il véhicule. Mais avant, il importe d’étudier les principaux théoriciens du réalisme classique.
Paragraphe 1 : Les principaux théoriciens du réalisme classique
Ce sont d’une manière générale les auteurs qui pensent que la nature humaine est mauvaise, inclinée au mal, à la violence, à l’égocentrisme. On peut distinguer les précurseurs du réalisme des auteurs modernes.
A- Les précurseurs du réalisme
Sur le plan théorique, le paradigme réaliste s’inspire d’un ensemble de propositions énoncées par Hobbes, Machiavel et, plus en amont durant l’antiquité grec par, Thucydide.
1- Thucydide
De l’avis de plusieurs spécialistes, le philosophe grec Thucydide (471 – 400 avant JC) est le premier précurseur du réalisme et de l’analyse des relations internationales. Son célèbre ouvrage intitulé histoire de la guerre Péloponnèse entre Athènes et Sparte, est une analyse des fondements de la puissance politique et militaire de ces deux (2) Etats et des causes de leur comportement agressif l’un vis-à-vis de l’autre. La principale conclusion de son enquête est que la guerre est le résultat de la peur et d’un changement dans l’équilibre des puissances. Sparte a attaqué Athènes parce qu’elle craignait de perdre sa suprématie sur le Péloponnèse. Dans un premier temps, Athènes a riposté pour se défendre. Mais, la dégénérescence de ses institutions démocratiques l’a amené à devenir de plus en plus fanatique et agressive, l’incitant à poursuivre la guerre contre Sparte dans le but d’usurper à cette dernière sa position hégémonique.
Deux (2) enseignements fondamentaux ont été retenus par les réalistes dans l’œuvre de Thucydide :
- Chaque Etat cherche nécessairement ou à maximiser sa puissance militaire et politique, ce qui crée des conditions favorables à la guerre ;
- La guerre est plus possible entre Etats autoritaires qu’entre Etats démocratiques puisque les seconds sont moins impérialistes que les premiers.
2- Machiavel
Machiavel constitue une autre référence incontournable des théoriciens réalistes. C’est un contemporain de la renaissance marquée par la rupture de l’ordre juridique et moral de la chrétienté et le développement des premiers Etat-nation qui ne reconnaissent aucune autorité supérieure à la leur, n’acceptent de se plier à aucune règle commune et qui, exclusivement préoccupés par le désir d’accroître leur influence, vivent dans un climat permanent d’hostilité et de rivalité.
Le mérite de Machiavel fut d’aborder la pratique gouvernementale indépendamment des considérations morales. Auparavant, le discours sur l’art de gouverner était élaboré sur des exigences idéales. On exhortait le souverain à observer certains principes moraux. Machiavel s’est, quant à lui, contenté d’examiner par quels moyens ou par quelles manières les principautés peuvent se gouverner et se conserver.
Dans son œuvre intitulé le prince, Machiavel expose le plus clairement sa vision des relations internationales. Celle-ci est dénuée de toutes considérations morales et religieuses. Pour Machiavel, le désir d’acquérir est une chose ordinaire et naturelle et tout Etat doit s’efforcer d’étendre ses possessions. Cette fin justifie l’emploi de tous les moyens. Pour agrandir son territoire et conserver ses conquêtes, le prince doit s’inspirer de la ruse du renard (la diplomatie) et de la force du lion (la puissance militaire) : « un prince doit savoir combattre en homme et en bête. Un prince doit se faire une réputation de bonté, de clémence, de pitié, de loyauté et de justice. Il doit d’ailleurs avoir toutes ses bonnes qualités, mais rester maître de soi pour en déployer de contraires, lorsque cela est expédiant. Je pose en fait qu’un prince, et surtout un prince nouveau, ne peut exercer impunément les vertus de l’Homme moyen parce que l’intérêt de sa conservation l’oblige souvent à violer les lois de l’humanité, de la loyauté » (Chapitre 3).
Machiavel conçoit les Etats comme des monstres froids. Ils n’ont ni amis ni ennemis, uniquement des intérêts nationaux à défendre. Cette aspiration naturelle à la souveraineté est la noble cause qui justifie l’emploi de tous les moyens pour sauvegarder et agrandir la puissance d’un Etat. Mais elle est également la cause des rivalités et des conflits inévitables et permanents entre les Etats, raison pour laquelle la société internationale ne peut être qu’anarchique.
3- Thomas Hobbes
Hobbes part d’un constat selon lequel l’Homme est naturellement porté à se quereller avec ses semblables, soit pour la recherche du profit, soit pour la défense de sa sécurité, soit pour la gloire. Cet état naturel de l’Homme est lié à l’absence de pouvoir organisé : « aussi longtemps que les Hommes vivent sans un pouvoir commun qui les tient tous en respect, ils sont dans cette condition qui se nomme guerre et cette guerre est de chacun contre chacun ».
Dès lors le seul moyen pour éviter le recours permanent et généralisé à la violence est d’instituer un pouvoir à l’abri duquel les Hommes pourront vivre en paix. Tel est l’objet du pacte social par lequel chacun abandonne sa liberté en échange de la sécurité que lui offre l’autorité concentrée, indifféremment, entre les mains du prince ou d’une assemblée.
Mais si l’état de société a pu être établit à l’intérieur de chaque république, l’état de nature subsiste intégralement dans les rapports entre républiques puisqu’aucun pouvoir n’existe qui puisse s’imposer à celles-ci.
La théorie de l’état de nature est critiquable. Adopter la théorie de l’état de nature, c’est introduire une distinction fondamentale entre politique intérieure et politique extérieure, mais c’est aussi privilégier le rôle de l’Etat en tant qu’acteur des relations internationales.
Certes, il est vrai que le recours à la force demeure légitime dans les rapports entre Etats alors qu’il est règlementé et monopolisé par la puissance publique à l’intérieur des Etats.
Toutefois, il est excessif dene retenir dans l’analyse des relations internationales que les états de tension. Ceux-ci alternent comme dans tout autre type de société avec les phases de solidarité.
Le second reproche que l’on peut adresser à la théorie de l’état de nature est le suivant :en identifiant les relations internationales aux rapports de force entre collectivités souveraines, les tenants de cette thèse privilégient de manière systématique et abusive le rôle des Etats qui sont considérés comme les acteurs exclusifs de ces relations.
Le fait que ceux-ci continuent de disposer, légalement, du monopole des armes et du droit de recourir à la contrainte n’empêche pas que puissent apparaitre d’autres pôles de décisions susceptibles d’exercer une influence et de recourir, eux aussi, à certaines formes de contraintes. C’est le cas des firmes multinationales.
B- Les auteurs modernes
Plusieurs auteurs ont contribué à l’approfondissement et à la systématisation du réalisme classique, mais trois (3) seulement retiendrons notre attention compte tenu de leur influence particulièrement déterminante. Il s’agit de Hans Morgenthau, Edward Hallet Carret Hedley Bull.
1- Hans Morgenthau
Il est considéré comme le successeur contemporain de Machiavel et d’Hobbes en raison de sa contribution majeure à la conception et à la systématisation de la pensée réaliste classique.
Le réalisme politique, selon Morgenthau, est basé sur six (6) principes fondamentaux :
- La politique, comme la société en générale, est gouvernée par des lois objectives qui ont leur racine dans la nature humaine. Il est donc possible de développer une théorie rationnelle qui reflète, au moins partiellement, ces lois objectives. En d’autres termes, il est possible d’établir une distinction entre ce qui est vrai objectivement et rationnellement (c’est-à-dire soutenu par l’évidence et éclairer par la raison) et l’opinion.
- La loi objective fondamentale qui gouverne les relations internationales est le fait que les Etats agissent toujours dans le but de défendre leurs intérêts ou leur puissance politique, bien qu’ils prétendent souvent agir au nom de motivation morale, humaniste, etc… .
- Les conditions dans lesquelles s’exerce la politique internationale peuvent varier mais non la finalité de cette dernière.
- Le réaliste est conscient de l’inéluctable tension entre l’impératif moral et les exigences de l’action publique, mais il considère le respect de ces dernières comme la vertu suprême en politique.
- Le réaliste refuse d’identifier les aspirations morales particulières d’un Etat avec la morale universelle.
- La sphère politique est autonome bien que d’autres sphères ne sont pas moins importantes.
2- Edward Hallet Carr
Il a également apporté une contribution majeure au développement de la pensée des précurseurs du réalisme. Il s’est demandé pourquoi la paix établit par le traité de Versailles en 1919 n’a duré que vingt (20) ans. Selon lui, la réponse se trouve chez Thucydide, Machiavel et Hobbes.
Dans cette optique, il affirme que la première guerre mondiale a été déclenchée par les puissances européennes (Autriche-Hongrie, Allemagne) qui craignait un affaiblissement de leur position au profit d’autres puissances rivales (Russie, France, Grande-Bretagne). Au départ, affirme-t-il, les Etats victimes d’agressions ont riposté pour protéger leur sécurité mais, progressivement, ils sont devenus de plus en plus belliqueux et ont cherché à poursuivre la guerre dans le but d’affaiblir leurs ennemis et de réaliser de nouvelles conquêtes. Suite à leur victoire, ils ont imposé à l’Allemagne vaincu de très lourdes réparations, inspirées d’un esprit revanchard plutôt que réaliste, ce qui a contribué à alimenter le ressentiment, le réarmement et une nouvelle agression de l’Allemagne en 1939.
Selon Edward Hallet Carr, si les puissances victorieuses de la première guerre mondiale avaient adopté une approche réaliste et approuvé des traités qui défendaient leurs intérêts, tout en respectant ceux des puissances vaincues, la seconde guerre mondiale n’aurait pas eu lieu.
3- Hedley Bull
Il soutient que la société internationale est anarchique dans le sens où des Etats souverains qui la composent sont totalement libre d’agir selon leurs intérêts égoïstes, n’étant soumis à aucune autorité supérieure. Cela ne signifie pas, cependant, que le fonctionnement de la société internationale soit dénué de toute forme d’ordre ; cet ordre est toutefois, créé par les Etats eux-mêmes. Ce sont notamment les rapports de force et les règles coutumières de comportement qu’établissent les dirigeants politiques ainsi que les normes morales communes auxquelles adhèrent les Etats.
Paragraphe 2 : Les principaux concepts et thèses du réalisme
Malgré les nuances qui existent entre les différents courants qui se rattachent à la conception réaliste des relations internationales, on peut cependant dégager quelques grands traits structurant cette conception : l’approche réaliste est fondée sur la problématique de l’état de nature, sur le rôle central de l’Etat et sur le paradigme de l’intérêt.
A- L’Etat de nature
Se référer à la pensée de Thomas Hobbes.
B- Le paradigme de l’intérêt
Se référer à la pensée de Hans Morgenthau.
C- La centralité de l’Etat
Pour la théorie réaliste, tout est politique. L’Etat joue un rôle central pour garantir l’ordre et la sécurité tant sur le plan interne que sur le plan des relations internationales.
Sur le plan de la politique étrangère, c’est la souveraineté qui confère à l’Etat sa légitimité. En effet, en vertu de la souveraineté les Etats possèdent des moyens militaires autonomes qui leur permettent d’envisager leur destruction mutuelle ; ce qui les rend, par nature, dangereux les uns pour les autres.
Section 2 : LE NEO-REALISME
Le néo réalisme peut être appréhendé à travers ses principes fondamentaux et ses auteurs.
Paragraphe 1 : Les thèses du néo réalisme
Le néo réalisme ou réalisme structurel est également désigné sous le vocable de structuro réalisme. Fondé par Kennth Waltz en 1979, le néo réalisme constitue une relecture, une reformulation du réalisme classique. Le néo réalisme a été formulé pour voler au secours du réalisme classique en déclin avec la mise en place d’organisations internationales.
Le néo réalisme considère que l’anarchie du système international est le seul déterminant du comportement des Etats. Ainsi, le néo réalisme estime que l’analyse des relations internationales doit privilégier les rapports entre les Etats au détriment du jeu politique interne (succession des gouvernements, divisions internes) qui n’a qu’une faible incidence sur la politique étrangère. Le néo réalisme rejette l’idée centrale du réalisme classique selon laquelle l’anarchie de la société internationale s’explique par une nature humaine profondément égoïste. Il affirme, quant à lui, que l’anarchie du jeu international résulte de la structure même de l’ordre international dépourvue de toute autorité souveraine au-dessus des Etats. Les néo réalistes enracinent donc leurs analyses non pas sur les motivations des acteurs mais sur les contraintes structurelles de l’ordre international.
Contrairement aux réalistes classiques qui considèrent la recherche de la puissance comme la première préoccupation des Etats, les néo réalistes estime que la préoccupation fondamentale des Etats est plutôt leur sécurité.
Paragraphe 2 : Les tenants de néo réalisme
On peut retenir trois (3) auteurs importants dans la reformulation du réalisme. Il s’agit de Kenneth Waltz, de Robert Gilpin et de Robert Keohane.
A- Kenneth Waltz (précurseur)
L’idée de base proposée par Waltz est le système international ou la structure des interactions entre Etats. A partir de ce point de départ, son but est de montrer, d’évaluer à quel point la structure établie par la distribution inégale des capacités, dans le système international, détermine les tendances du comportement des Etats.
Pour Waltz, le système international contemporain est anarchique, étatique, hiérarchisée et dominée par deux (2) grandes puissances. Il peut être assimilé à un marché compétitif. L’expérience de la compétition dans le système détermine les objectifs des Etats les comportements des Etats ne peuvent donc pas être expliqué simplement en référence aux motivations et intentions de leurs dirigeants. Toute tentative d’expliquer les comportements internationaux à partir de variables domestiques est qualifié, par Waltz, de réductionniste.
B- Robert Gilpin
Gilpin perçoit la nature du système international comme essentiellement inchangée depuis l’époque de Thucydide. Il définit les relations internationales comme la lutte renouvelée pour la richesse et la puissance entre acteurs indépendants dans un état d’anarchie.
Malgré la pérennité de cette situation d’anarchie, Gilpin reconnait la possibilité de certains changements internationaux correspondants à la transformation de la nature des acteurs de la société internationale (cités, empires, Etats). Selon Gilpin, le changement du système se rapporte à la modification de la gouverne du système (exemple : changement de puissance dominante).
Gilpin analyse le changement d’interaction comme une évolution des rapports entre les acteurs des relations internationales (exemple : degré de coopération). A travers l’histoire, les changements de système se sont accompagnés de guerres généralisées. En particuliers, les transitions entre les règnes hégémoniques se traduisent en conflits systémiques.
C- Robert Keohane
Keohane tente de démontrer que l’interaction des Etats peut être coopérative car, même si l’harmonie naturelle n’existe pas, il est dans l’intérêt des Etats de former des régimes internationaux, c’est-à-dire des ensembles de règles qui limitent leur capacité d’agir unilatéralement.
Selon Keohane en dépit des divergences d’intérêt, l’économie internationale se caractérise par la coopération parce qu’il est dans l’intérêt, à long terme des Etats, d’établir une telle coopération. Il estime que les Etats restent toujours guidés par leur intérêt national. En d’autres termes, l’intérêt national conduit à l’établissement de structures internationales contraignantes. C’est l’idée de pacte social international.
Section 3 : EXAMEN CRITIQUE DU REALISME
D’une manière générale, les théories, qui considèrent la société internationale comme une société anarchique, pèchent à la fois par excès et par défaut.
Paragraphe 1 : Les excès du réalisme
Ils peuvent être appréhendés à travers trois (3) points :
- L’idéalisation des sociétés nationales ;
- La confusion entre fonction et structure ;
- La non-prise en considération de l’intégration.
A- L’idéalisation des sociétés nationales
La question se pose de savoir si les sociétés nationales sont des sociétés aussi intégrées qu’on le dit ?
Une réponse négative doit être donnée à cette question. En effet, il y a un nombre considérable d’Etats, les Etats nouveaux, ceux du tiers-monde, issus de la décolonisation, qui ne sont pas des sociétés intégrées. Le colonisateur avait fait coexister, au besoin par la force dans le cadre de frontières tracées au gré des intérêts ou selon les hasards de la conquête, des populations qui, antérieurement à la conquête, appartenaient à des sociétés globales. Certaines de ces sociétés avaient d’ailleurs atteint le stade d’Etat, de sorte qu’on a vu coexister à l’intérieur d’un même territoire des Etats tout à fait différent les uns des autres aussi bien par l’histoire que par les coutumes, la langue, la civilisation, etc… .
Aujourd’hui les Etats nouveaux issus de la colonisation sont confrontés à un problème : celui de l’intégration nationale. Les problèmes de la question nationale sont à l’ordre du jour. Si ces problèmes existent, cela veut dire que ces Etats ne sont pas des sociétés nationales intégrées.
Une dernière observation concerne la violence. Sans doute, il est exact que la violence caractérise la société internationale. Toutefois, on peut se demander si elle ne se retrouve pas dans les sociétés nationales. Si l’Etat dispose du monopole de la contrainte, on est obligé de constater que le monopole de la violence au bénéfice de l’autorité publique n’empêche pas pour autant les citoyens eux-mêmes de recourir à la violence lorsqu’ils estiment qu’ils sont victimes d’une politique contraire soit aux intérêts de l’ensemble de la population, soit aux intérêts de telle ou telle classe ou catégorie sociale.
En définitive, les Etats ne sont pas des sociétés aussi policées qu’on voudrait le faire croire. Inversement, la société internationale n’est pas aussi anarchique, aussi désorganisée qu’on le laisse entendre. Un usage abusif des moyens d’information modernes conduit à polariser l’attention de l’opinion publique sur les conflits internationaux parce que c’est souvent le moyen de mieux vendre la marchandise information.
En fait, une observation un peu plus attentive de la vie internationale montre que les relations internationales sont aussi des relations pacifiques et, dans un grand nombre de cas, les rapports entre les Etats se déroulent de façon satisfaisante sur la base de l’observation scrupuleuse du Droit international. Si cet aspect n’est pas perçu, s’il n’est pas ressenti au niveau des consciences individuelles c’est parce que, dans une grande mesure, les moyens de communication modernes et les théories développées par des auteurs comme Raymond Aaron et Morgenthau continuent à faire pénétrer dans les esprits une représentation exagérément pessimiste de la société internationale.
B- La négligence de la distinctionentre fonction et structure
On ne peut pas dire, comme le soutiennent les réalistes, qu’au sein de la société internationale, les fonctions propres à toute société ne sont pas remplies. Il faut, en effet, établir une distinction entre le problème des structures et celui des fonctions. Sous l’influence de Montesquieu et des juristes attachés au formalisme, nous somme accoutumés à ce qu’à des fonctions précises, notamment les fonctions juridiques de l’Etat (législative, exécutive et juridictionnelle), correspondent des structures, c’est-à-dire un Parlement, un gouvernement, des tribunaux.
Cette loi de correspondance n’a pas toujours existée, notamment au niveau des communautés primitives et il n’est pas non plus certain qu’elle existera encore dans quelques siècles. Elle n’existe pas non plus dans la société internationale. En d’autres termes, il n’y a pas de corrélation entre les fonctions et les structures telle que nous les observons au plan interne.
Cependant comme le soutient George Scelle, les fonctions sociales sont remplies dans la société internationale : « ces fonctions s’accomplissent par la collaboration et par l’action concurrente des gouvernements et agents étatiques agissant comme gouvernants et agents internationaux ». Il est produit, de la sorte, le concept de dédoublement fonctionnel. L’idée qu’il met en avant pour soutenir ce concept est que les gouvernants nationaux agissent tantôt pour le compte des sociétés nationales, à la tête desquelles ils se trouvent placées, tantôt pour le compte de la société internationale dont ils font parties.
Pour lui, la fonction législative est parfaitement remplie sur le plan international. Alors que dans l’Etat cette fonction est remplie concurremment par le Parlement (loi) et par le gouvernement (règlements, décrets) ou par le seul pouvoir exécutif (dictature, monarchie absolue) ; sur le plan international, elle n’est pas remplie par une sorte d’autorité supranationale mais par les Etats eux-mêmes.
On peut donc convenir avec George Scelle que les fonctions propres à la société internationale peuvent être remplie par des moyens différents de ceux qui existent dans le cadre des sociétés nationales.
C- L’oubli de l’intégration
Si l’on va au-delà de la société internationale globale, pour prendre en considération les sociétés internationales particulières, on voit alors se manifester, avec plus ou moins de force, des mouvements des intégrations politiques externes qui conduisent les Etats, jusqu’à lors séparés, distincts, indépendants et souverains, à se rapprocher les uns des autres, à faire abandon au moins d’une partie de leur souveraineté. C’est ce qui se passe en particuliers dans le cadre de l’Union Européenne. Il ne faut donc pas négliger le niveau régional où l’on voit se manifester des phénomènes d’intégration comparable à ceux qui se sont manifestés dans le cadre des Etats.
En définitive, la théorie selon laquelle la société internationale serait une société anarchique présente un tableau exagérément noirci de la société internationale. La tendance perverse des auteurs réalistes est de mettre en relief les situations conflictuelles tandis que les situations de coopération pacifique et même des situations d’intégrations sont volontairement laisser dans l’ombre.
Paragraphe 2 : Les silences du réalisme
La conception réaliste des relations internationales réduit de façon abusive la société internationale sinon aux seuls Etats qui la composent ; du moins à certains d’entre eux. En réalité, la société internationale est beaucoup plus qu’une simple société d’Etats souverains.
Les silences du réalisme portent sur les organisations internationales, les individus et la nature sociale de l’Etat.
A- Les organisations internationales
Les partisans de la thèse de l’anarchie laissent volontairement de côté ou minimise le faite que la novation de la période contemporaine est l’apparition des organisations internationales de plus en plus nombreuses et de plus en plus diversifiée, des organisations internationales capables d’agir au même titre que les Etats dans l’ordre international. Il est vrai que ces organisations internationales ne sont que des créations des Etats et les membres de ces organisations uniquement des Etats.
Toutefois, toute organisation a, dans une certaine mesure, tendance à acquérir sinon une indépendance, tout au moins une certaine autonomie de pensée et d’action. Ainsi comme le souligne Michel Virally, à côté des Etats il y a aussi des organisations internationales qui peuvent être des acteurs plus ou moins autonomes de la vie internationale.
B- Les individus
Il ne faut pas oublier que la société internationale est également composée d’individus et de groupements d’individus. On peut même dire que la réalité première aussi bien de la société internationale que des sociétés nationales c’est l’individu, les Hommes qui la composent.
Les peuples, par opposition aux gouvernants, sont capables de secréter une opinion publique internationale susceptible d’influencer les relations internationales. Les groupements privés, particulièrement ceux qui ont une dimension internationale, sont susceptibles de constituer des acteurs internationaux plus ou moins indépendants à l’égard des Etats.
C- La nature sociale de l’Etat
Il est utile de s’interroger sur la nature et les caractéristiques fondamentales des formations sociales. En d’autres termes, la base économique est déterminante dans l’analyse des relations internationales. Un Etat socialiste n’a pas la même vision des relations internationales qu’un Etat capitaliste. Or les réalistes ne prennent pas en compte cette donnée dans leurs analyses.
Chapitre 2 : LA CONCEPTION MARXISTE DES RELATIONS INTERNATIONALES
Il convient d’exposer la théorie marxiste avant de l’apprécier.
Section 1 : L’EXPOSE DE LA THEORIE MARXISTE
Paragraphe 1 : Le fondement de la théorie
Pour Karl Marx, l’histoire des sociétés est commandée par les rapports de production et par les antagonismes de classes qui en découlent directement. C’est au niveau de ces affrontements pour le contrôle des instruments de production que se situe la réalité sociale. Les institutions y compris l’Etat et les joutes qui se déroulent à leur sujet ou entre elles ne sont que des éléments d’une superstructure qui n’a aucune existence propre et qui se contente de reproduire, en les masquant, les conflits de classe.
La superstructure désigne l’ensemble des idées d’une société c’est-à-dire ses productions non matérielles : les institutions politiques, les lois, la religion, la pensée, la philosophie et la morale.
Cela ne signifie pas, cependant, que les phénomènes politiques et institutionnels soient dépourvus de tout intérêt. Mais, ils ne peuvent être compris qu’à la lumière de la lutte pour le contrôle des moyens de production. Dans cette perspective, les institutions sont des instruments au service de la classe dominante qui, par leur intermédiaire, renforce son pouvoir et opprime ses adversaires.
Paragraphe 2 : L’aspect international de la théorie
La position de Marx à l’égard des problèmes internationaux peut être résumée en trois (3) propositions.
En premier lieu, Marx refuse de considérer la société internationale comme la simple juxtaposition d’Etats souverains. L’Etat, n’étant pour lui qu’une superstructure, il ne peut constituer la cellule des rapports internationaux. Ceux-ci ne peuvent être fondés que sur des antagonismes de classe à l’échelle mondiale. Tout au plus, on peut admettre que la compétition entre Etats constitue l’une des formes de la rivalité entre les bourgeoisies nationales qui se disputent le contrôle des marchés des matières premières et les débouchés. La lutte entre les Etats est en partie fictive car ce sont les acteurs économiques, autrement dit les détenteurs du capital, qui interviennent derrière le paravent des gouvernements pour dicter, en fonction de leurs seuls intérêts, la paix ou la guerre. Quiconque veut donc comprendre les phénomènes internationaux doit analyser, plutôt que les initiatives ou les motivations des gouvernants, les calculs des détenteurs du pouvoir économique.
Or ceux-ci tendent, c’est la seconde proposition, non pas à consolider mais à détruire les barrières que le découpage arbitraire de l’espace en multiples entités indépendantes oppose à la libre expansion du capitalisme.Placerla lutte pour l’amélioration de l’ordre mondial sur le terrain des compétions entre Etats représente donc un anachronisme dérisoire. C’est aux nœuds des rapports de production qu’il convient de se situer pour découvrir à la fois la cause essentielle des conflits et les remèdes au désordre.
C’est ici qu’intervient, en troisième lieu, la vision évolutive qui domine tout le système de pensée de Karl Marx. Selon lui, c’est du système capitaliste lui-même que viendront successivement le mal et le remède. Le capitalisme, entrainé par la loi de la recherche du profit, ne pourra continuer à se développer et à surmonter les contradictions qu’il suscite sur son passage qu’en s’étendant progressivement à toutes les parties du monde. C’est lorsqu’il aura assuré son emprise sur tous l’espace habité et mobilisé, en vue de leur exploitation, toutes les ressources disponibles qu’il se heurtera fatalement à des contradictions insurmontables parce que non susceptible d’être exporté. Ainsi, à partir du moment où le système capitaliste est universellement répandu, les conflits qu’il engendre entre détenteurs de la force de production et détenteurs de la force de travail deviennent forcément insolubles. Il y aura une révolution qui va surgir, non pas de la réforme ou de l’abolition de telle ou telle société bourgeoise mais de l’autodestruction du capitalisme parvenu au faite de sa puissance.
Section 2 : L’APPRECIATION CRITIQUE DE LA THEORIE MARXISTE
Il serait faux de nier l’influence de la pensée marxiste comme son utilité sous le prétexte qu’elle n’a pas été vérifiée par l’évolution des faits.
Marx a contribué à dévoiler un aspect totalement méconnu, à son époque, des rapports internationaux. Il a eu, en effet, le mérite de faire ressortir l’interdépendance des phénomènes économiques et politiques, internes et externes et de déceler la marche inexorable vers l’universalisation des rapports internationaux. Il a formulé une théorie qui explique une partie des faits. Beaucoup de traits de la société internationale contemporaine, comme le mouvement accéléré de la concentration des entreprises et le rôle croissant que jouent, dans la vie économique comme dans la vie politique, les firmes internationales, semblent, à bien des égards, confirmé l’hypothèse marxiste.
Il reste, cependant, que cette hypothèse n’explique pas tout et qu’elle se heurte à des contradictions difficiles à surmonter.La première question concerne la pluralité d’interprétation issue de marxisme.
Le capitalisme ne s’est pas encore effondré comme un seul bloc. Il en a résulté la coexistence et l’antagonisme entre deux (2) groupes d’Etats capitaliste et socialiste. Cette rivalité a affecté inévitablement la conduite des adversaires en présence.
Les considérations de puissances et les conséquences qu’elles entraînent font remonter à la surface, de part et d’autres, les règles classiques du jeu politique et relèguent à l’arrière-plan celui des lois économiques.
Dans l’ardeur de la compétition, le système capitaliste se trouve indiscutablement affecté, mais le système socialiste qui lui fait face n’est pas plus conforme au modèle théorique dont il persiste à se réclamer.
Les exigences de la lutte font que les deux (2) camps sont souvent conduis à utiliser les mêmes armes qui sont celles de la volonté de puissance et de la ruse. La défense de l’intérêt national et la lutte pour le pouvoir, dans les Etats socialistes, l’ont toujours emporté sur les exigences de l’internationalisme prolétarien.Les Etats socialistes sont d’abord des Etats jaloux de leur indépendance et soucieux de protéger leur souveraineté.
En définitive, les travers dénoncés par les marxistes, en ce qui concerne le capitalisme, se retrouvent dans les Etats socialistes.
2ème partie : LE COURANT SOLIDARISTE DES RELATIONS INTERNATIONALES
Selon ce courant, les relations internationales contemporaines reposent sur la coopération entre les Etats. En effet sous l’effet du développement économique et technologique, l’accroissement des échanges internationaux a entraîné une interdépendance croissante des Etats et par conséquent une restriction de leur autonomie. Dans leur ensemble, les théories solidaristes considèrent la société internationale comme un espace d’échange et de relations synergiques (harmonieuses).Si la conception libérale est la principale composante du courant solidariste (chapitre 1), elle cohabite avec d’autres théories (chapitre 2).
Chapitre 1 : LA CONCEPTION LIBERALE DES RELATIONS INTERNATIONALES
Le terme libéral vient du mot latin « liber » c'est-à-dire libre. Au départ, c'est-à-dire au XVIème et XVIIème siècle, les penseurs et partisans européens du libéralisme veulent se libérer des contraintes imposées par les sociétés de leur époque. La première liberté qu’ils recherchent est celle de croire dans la religion de leur choix, c'est-à-dire de suivre leur propre conscience et leur propre raison. Cette liberté implique la liberté d’expression et la liberté de militer en faveur de ses idées ; donc de s’organiser sans crainte de représailles.
Le libéralisme deviendra un mouvement en faveur de l’instauration d’un régime politique qui place les libertés individuelles au-dessus de tout : la démocratie. C’est en faisant de l’individu la seule unité d’analyse possible, la principale unité de valeurs que le libéralisme acquiert un caractère révolutionnaire par rapport au réalisme pour lequel l’acteur essentiel est l’Etat souverain.
Pour saisir la conception libérale des relations internationales, trois (3) points seront examinés :
- Les auteurs libéraux ;
- Les principales thèses du libéralisme ;
- La mise en œuvre du libéralisme.
Section 1 : LES AUTEURS LIBERAUX
Ils peuvent être classifiés en deux (2) groupes :
- Les précurseurs ;
- Les libéraux du XXème siècle.
Paragraphe 1 : Les précurseurs du libéralisme
Les précurseurs du libéralisme ont été influencés par les idées de certains philosophes dont Platon et Aristote. Quelques-uns ont apporté une contribution décisive à la théorie libérale. Ce sont Leibniz, Kant, Spinoza, Montesquieu, Jean Jacques Rousseau.
Toutefois, ce sont les auteurs anglais qui ont eu une plus grande influence parce que leurs idées ont été adoptées et appliquées par les deux (2) puissances dominantes des XIXème et XXème siècles : les Etats Unis et la Grande Bretagne. Il s’agit de John Locke, David Hume, Adam Smith, David Ricardo et Jeremy Bentham. Tous ces auteurs ont insisté sur la primauté des droits naturels individuels dans les domaines politiques et économiques et la nécessité de limiter le rôle de l’Etat à la création et au maintien des conditions économiques, sociales et politiques propices aux échanges entre individus. Les libéraux, c'est-à-dire les précurseurs du libéralisme, admettent que la société internationale est constituée d’Etats indépendants qui rivalisent pour la défense de leurs intérêts propres, comme les individus compétitionnent au sein de chaque Etat pour la satisfaction de leurs intérêts et besoins.
Cependant, les relations internationales peuvent être civilisées et pacifiées au même titre que les relations interpersonnelles si elles sont fondées surle capitalisme, le droit et la démocratie.
Paragraphe 2 : Les libéraux du XXème siècle
Les continuateurs de la pensée libérale au XXème siècle sont plus nombreux ; le libéralisme ayant donné naissance à divers développement et reformulations à partir de la seconde moitié du XIXème siècle. Les présidents américains Thomas Woodrow (1856-1924) et Franklin Delanoë Roosevelt (1882-1945) sont souvent considérés comme des représentants du libéralisme classique parce qu’ils ont défendu ardemment la création d’organisations internationales vouées au maintien de la paix à l’issue des deux (2) guerres mondiales : la SDN (créée par Thomas Woodrow) et l’ONU (par Roosevelt). Ils ont soutenu la thèse d’une relation de cause à effet entre l’amélioration de la prospérité, grâce au développement du commerce, et le maintien de la paix.
C’est chez les juristes qu’on retrouve les principaux défenseurs du libéralisme classique au XXème siècle.
Section 2 : LES PRINCIPALES THESES DU LIBERALISME
On retrouve, dans l’analyse libérale des relations internationales, une idée centrale : la paix par l’interdépendance. Nombreux sont les auteurs qui formulent des projets pour rendre la paix définitive. Ces auteurs remplacent la guerre par l’interdépendance.
Les progrès de l’école libérale des relations internationales s’expliquent par l’impasse de la guerre. Alors que les réalistes pensaient la guerre comme un prolongement naturel de la politique des Etats, la modernisation des techniques et la mobilisation de masse ont rendu la guerre toujours plus sanglante et plus coûteuse. La première guerre mondiale a fait 10 millions de morts et la seconde guerre entre 40 et 60 millions.
A la vision réaliste des relations internationales, les libéraux opposent l’interdépendance et la solidarité internationale. Trois (3) facteurs doivent concourir au rapprochement entre les peuples : la démocratie, le commerce et l’institutionnalisation de la société internationale.
Paragraphe 1 : La transposition du système démocratique à la société internationale
Dans une perspective idéaliste qu’on pourrait qualifier de « kantienne », le monde ne connaîtrait pas la guerre s’il n’était composé que de démocraties.En effet, déclaraitEmmanuel Kant, le recours à la force est l’apanage des Etats autoritaires, nationalistes, gouvernés par la passion ou l’instinct du pouvoir. Il est appelé à disparaître au fur et à mesure du développement des connaissances, du savoir et de la raison dont les démocraties sont l’incarnation. Le triomphe de la démocratie à l’échelle mondiale signifiera la fin des guerres et l’instauration d’une paix universelle durable. Cette vision idéaliste ne tient pas compte des conflits d’intérêts entre les Etats. Il est arrivé dans l’histoire que des démocraties se soient fait la guerre.
Paragraphe 2 : Le développement des échanges
Les libéraux fondent essentiellement leurs espoirs sur le développement des échanges dont doivent découler le progrès économique et technique et la solidarité entre les Etats. L’effet pacificateur du commerce est souligné par certains auteurs. Ainsi, Montesquieu écrit : « L’Europe n’est plus qu’une nation composée de plusieurs, la France et l’Angleterre ont besoin de l’opulence de la Pologne et de la Moscovie, comme une de leurs provinces a besoin des autres ».
La théorie des jeux, très prisée par les analystes américains, devait aider à justifier la paix par le commerce et la sécurité. Le jeu « à somme nulle » est celui où il n’y a pas de profit collectif : ce que l’un gagne, l’autre le perd, et inversement. La guerre ressort de ce principe. Au contraire, la théorie de l’échange, proposée par les libéraux, ressort selon ces derniers du « jeu à somme positive » où chacun gagne. Le commerce international, qui repose sur la théorie des avantages comparatifs et la spécialisation des pays exportateurs, enrichit tous ses participants.
Cette théorie n’est pas totalement confirmée par les faits. Le capitalisme ne fait pas que des gagnants. En dehors du fait qu’il se soucie peu des laissés pour compte (les chômeurs, les marginaux), il n’efface pas les rivalités. Il s’en nourrit même.
Paragraphe 3 : L’institutionnalisation de la société internationale
Les libéraux, contrairement aux réalistes qui militent pour l’équilibre des puissances, recherchent ou proposent la mise en place d’institutions internationales ; plus particulièrement des institutions de sécurité collective. Si les libéraux que la société internationale est composée d’Etats souverains, ils font aussi une place aux acteurs non étatique c’est-à-dire les organisations internationales. Sur la base de cette proposition, les Etats ont créés la Société Des Nations et plus tard l’Organisation des Nations Unies. On peut également citer des organisations comme la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier CECA, l’UE, l’UA, etc… .
Section 3 : LA MISE EN ŒUVRE DU LIBERALISME
Les idées préconisées par les libéraux ne guident pas toujours les démocraties libérales dans la conduite de leur politique étrangère. Ces démocraties, notamment les grandes puissances, pratiquent souvent une politique extrêmement réaliste ; les Etats-Unis en sont l’exemple le plus patent.
Il est parfois difficile de distinguer les aspects libéraux et les aspects réalistes d’une même politique. On peut ainsi faire une analyse libérale du plan Marshall, mais on peut aussi en faire une analyse réaliste.
Ø L’analyse libérale
Sous cet angle, le plan Marshall serait un acte de grande générosité du peuple américain pour aider au relèvement de l’Europe dévastée par la guerre et promouvoir, par des institutions, l’appui à une forme d’unification européenne, la coopération entre des Etats qui n’avaient fait que se déchirer durant la première moitié du XXème siècle afin d’écarter pour l’avenir la survenance de pareille tragédie.
Ø L’analyse réaliste
Considérant que la misère était l’élément sur lequel, après la défaite de 1918 et la crise de 1929, tant le nazisme que le communisme avaient prospéré, les Etats-Unis ont pris l’initiative du plan Marshall afin de remettre sur pied les économies de l’Europe de l’Ouest, de sorte que, devenues prospères, elles soient moins vulnérables au communisme qui, au contraire, aurait pu capitaliser sur le mécontentement social causé par un après-guerre fait de dépressions et de frustrations économiques.
De même la Charte des Nations Unies, d’inspiration nettement libérale (règlement pacifique des différends, égalité souveraine des Etats), contient des éléments de réalisme indiscutable (le Conseil de Sécurité étant le plus visible) en sorte que libéraux comme réalistes peuvent revendiquer l’inspiration qui a conduit à sa création et à son relatif succès.
Chapitre 2 : LES AUTRES COMPOSANTES DU COURANT SOLIDARISTE
Le courant solidariste est composé de plusieurs autres théories. Cependant, nous allons opérer un choix forcement arbitraire en exposant que quelques-unes :
- La théorie fédéraliste ;
- La théorie fonctionnaliste ;
- La théorie de Deng Xiaoping.
Section 1 : LA THEORIE FEDERALISTE
Le fédéralisme international a pour but d’encadrer la souveraineté des Etats, principale source des conflits internationaux. Au XIXème siècle, Pierre Joseph Proudhon fut le premier auteur a développé l’idée d’un fédéralisme sociologique et politique ainsi que d’une société mutualiste sur le plan économique. Conscient des contradictions et des oppositions entre les différentes classes sociales, il pense que les individus peuvent mettre en commun leur force en s’associant pour la réalisation d’une société plus juste. Sa théorie influencera le développement de la coopération internationale.
Au XXème siècle, George Scelle présentera un système international fondé sur une solidarité sociale et non sur les concepts juridiques tels la notion d’Etat ou de souveraineté. Sa théorie, qualifiée d’objectiviste ou de solidariste, repose sur des considérations sociologiques. Le droit international est un ius gentium dont les individus sont les principaux sujets. Selon lui, la solidarité de la société internationale (société composée d’individus et non d’Etats), le développement de la coopération internationale et son institutionnalisation vont entrainer la création d’institutions et de règles communes.
En Europe, Jean Monnet va être le concepteur d’une nouvelle coopération intergouvernementale qui devait mener à un certain abandon de souveraineté des Etats au profit d’institutions communes : les communautés européennes (la CECA, la Communauté Economique Européenne et la Communauté Européenne de l’Energie Atomique).
Section 2 : LA THEORIE FONCTIONNALISTE
Le fonctionnalisme consiste en une approche sectorielle des rapports internationaux, dans un esprit de coopération, en marginalisant la politique. Ainsi, la coordination interétatique doit entrainer des transferts de souveraineté vers des organisations internationales spécialisées ou vers une structure communautaire qui, à terme, impliquera une intégration supranationale. C’est dans cette optique, à partir de 1960, le processus d’intégration européenne conduira à la création de la CECA et de la CEE.
Section 3 : LA THEORIE DE DENG XIAOPING
Deng Xiaoping n’était pas seulement un grand homme politique, il était aussi un extraordinaire stratège et diplomate. Sa politique étrangère avisée et ses concepts stratégiques prévoyant basés sur un jugement scientifique de la situation internationale, sont reconnues de sorte que sa théorie sur la diplomatie est devenue est devenue le guide pratique de la Chine actuelle.
Deng considérait comme des plus importants dans le monde actuel, la paix et le développement, qui n’ont, jusqu’à ce jour, pas encore été réalisé. Les deux (2) problèmes sont étroitement liés et l’un ne va pas sans l’autre. La paix est la condition d’existence et de développement de l’humanité. Sans un environnement paisible, aucun pays ne peut se concentrer sur la construction économique ; sans un développement social et économique coordonné, équilibré et solide, le monde ne peut atteindre la paix durable et la stabilité. Deng attache une grande importance à l’écart sud-nord et proclame que le rétrécissement de la distance et, éventuellement, son abolition entre le tiers-monde et les pays développés est essentielle pour résoudre les problèmes actuels du monde. Pour lui, la paix est le but de tous les peuples. La paix et le développement sont les thèmes des temps modernes.
Il constate qu’actuellement la paix et le développement font face à des défis comme l’hégémonisme, de nouvelles formes de menaces à la sécurité, le développement inégal entre le nord et le sud, la détérioration de l’environnement, etc… . Pour affronter ces défis, tous les pays devraient se respecter mutuellement, coopérer économiquement et chercher le développement commun.
Dans le domaine de la culture, des efforts concertés devraient étendre les échanges et renforcer la compréhension mutuelle. Dans le champ de la sécurité, il faut établir la confiance mutuelle et combattre cote à cote les menaces. Dans les relations bilatérales, il est impératif d’observer le principe d’égalité et d’abandonner l’unilatéralisme.
En somme, tous les pays devraient se vouer à l’établissement d’un ordre politique et économique stable, juste et rationnel pour la paix comprenant de nouveaux concepts de sécurité et de civilisation.
Paragraphe 1 : L’établissement d’un nouvel ordre
Au début des années 1990, Deng prôna l’idée d’un ordre politique, économique stable, juste et rationnel pour la paix, sur la base des principes de coexistence pacifique. Pour établir cet ordre, tous les pays devraient briser ensemble l’ancien ordre, s’opposer à l’hégémonisme et à toute ingérence dans les affaires internes des autres, renforcer et étendre la coopération économique internationale basée sur l’égalité et abandonner toutes mesures et gestes discriminatoires.
Ce nouvel ordre repose sur le respect mutuel de la souveraineté et sur la non-ingérence. Son essence consiste à rechercher l’égalité, les avantages mutuels et à se compléter l’un l’autre. Pour réaliser cet objectif, tous les pays devraient se soumettre aux principes d’égalité souveraine et de non-ingérence, coopérer à la création d’un environnement international stable, sur et paisible dans lequel chaque membre de la communauté internationale, grand ou petit, puisse indépendamment choisir sa voie de développement.
Après la guerre froide, certains pays ont commencé à prêcher que la souveraineté était dépassé et que les droits humains étaient supérieur à la souveraineté. Au contraire, soutient Deng Xiaoping, le concept de nouvel ordre du monde requiert la multipolarité du monde. Ce qui implique que les problèmes d’un pays doivent être réglés par le peuple de ce pays comme les affaires mondiales doivent l’être par tous les pays. Cependant, cette structure multilatérale diffère, par nature, des formes précédentes dans lesquelles les grands pays exercent une influence sur le reste du monde.
Dans la mondialisation économique, la vieille structure économique n’a pas encore été délogée fondamentalement. Elle est conduite par les pays développé qui décide des règles du jeu. Par conséquent, les pays sous développé en bénéficient et ceux-ci peuvent même voir leurs intérêts menacés. La coopération économique internationale devrait chercher à atteindre un résultat « gagnant-gagnant » dans la promotion du développement commun.
Ni un monde multipolaire, ni la mondialisation économique ne peuvent changer le fait que tous les pays sont égaux, indépendants dans la communauté internationale et rien ne doit excuser la limite de souveraineté imposée aux autres. C’est donc sans fondement qu’on dit que la souveraineté est dépassée.
Paragraphe 2 : La sécurité sans alliance militaire
La théorie de Deng Xiaoping insiste surtout sur l’égalité souveraine. Dans ce but, une garantie de sécurité est indispensable. Selon la pensée traditionnelle, établir une alliance militaire ou construire l’armement est la mesure la plus fiable pour ce faire. Une telle idée va indubitablement intensifiée la course aux armes et approfondir le soupçon mutuel et la méfiance ; menant à l’instabilité de la situation internationale et affectant le développement économique et social des pays concernés.
La Chine propose donc un nouveau concept de sécurité qui repose sur la confiance réciproque, les avantages mutuels, l’égalité et la coopération comme mesure principale pour assurer la sécurité internationale. Dans la confiance mutuelle, les pays de dimension différentes, de divers systèmes sociaux, idéologies, cultures et niveau de développement peuvent opérer dans un esprit de respect mutuel et d’égalité. Le respect de la souveraineté des autres constitue donc la base du maintien de la paix.
Paragraphe 3 : La coexistence de diverses civilisations
Deng Xiaoping soutient que tous les pays ont leurs points forts et contribuent à la civilisation de l’humanité. Il estime que les relations internationales ne devraient pas être dictées par les systèmes sociaux ou idéologiques.
La diversité de civilisation est une caractéristique de base de la société humaine. Il existe des différences dans les systèmes sociaux, les valeurs, les sentiers du développement, les traditions, la religion et la culture. Mais, chacun devrait respecter l’autre et chercher le progrès commun dans l’harmonie.
Les différences historiques, culturelles, économiques et sociales devraient jouer un rôle de complément, de force et de progrès plutôt que d’être une source d’isolement, d’hostilité et de conflit. Chacun peut apprendre de l’autre. Ne pas accepter et respecter l’autre relève de l’hégémonisme et va à l’encontre des lois de l’histoire. Près de 200 pays dans le monde forment une population combinée de 6 milliard d’habitants, chacun avec ses traditions et son modèle de développement. Il est impossible de les uniformiser et d’effacer leurs caractéristiques propres.
Indéniablement, les valeurs différentes ont toujours engendré des conflits et des disputes.Mais on peut les empêcher. Aujourd’hui, l’humanité est entrée dans une époque où les diverses civilisations devraient apprendre à coexister dans la paix, en recherchant la prospérité commune dans l’harmonie ; sinon ça sera la tragédie.
3ème partie : LES PARADIGMES MINEURS
Les paradigmes mineurs sont ceux qui viennent en appui ou en complément des paradigmes majeurs. Ils ne sont pas toujours liés à l’un ou à l’autre d’entre eux. Les paradigmes mineurs sont ceux qui prétendent expliquer, non pas l’ensemble de l’histoire des relations internationales, mais un état donné des relations internationales, à une période ou dans une région particulière ou un Etat spécifique. Ces analyses ne prétendent généralement pas être des analyses globales des relations internationales ; précisément parce qu’elles contestent toute vision globale de celles-ci.
On peut examiner, au titre des paradigmes mineurs, la géopolitique et la géo-économie d’une part, les analyses sociologiques et psychologiques d’autre part.
Chapitre 1: LA GEOPOLITIQUE ET LA GEO-ECONOMIE
Section 1 : LA GEOPOLITIQUE
La géopolitique est un paradigme qui a failli disparaitre. Du fait qu’elle a été liée à des expériences historiques désastreuses voir criminelles.
On peut rechercher une origine à la géopolitique dans la révolution française avec le concept de « frontières naturelles » qui serait celles du Rhin, des Alpes, des Pyrénées qui servaient à justifier des conquêtes. De la même manière que la politique allemande, à partir de 1850, tirait argument de la « géographie humaine » du peuple allemand pour en tirer des conclusions sur la « géographie politique » de l’Etat allemand, qui devait pouvoir s’étendre partout où étaient des allemands (Bismarck), ou partout où se trouvait la « race allemande » (concept plus large développé par les nazis), ou « sur tout l’espace nécessaire à la grandeur de la race allemande » (selon l’idéologie développée par les théoriciens nazis).
La géopolitique s’attache en particulier à l’observation de quelques facteurs et de leurs influences sur un espace donné : la géographie, le territoire, la démographie, l’influence stratégique, le pouvoir militaire, la puissance économique, etc… .Elle s’intéresse aussi à d’autres facteurs mis en évidence par d’autres sciences comme la sociologie. On parlera ainsi de géopolitique des religions.
Il faut souligner la déterritorialisation de la puissance, surtout celle économique, ce qui rend la géopolitique peu pertinente à l’analyse des relations internationales ; sauf dans certains cas particuliers. En effet des Etats à superficie restreinte et peu exploitable peuvent être très riche, comme la Suisse, le Japon, Israël, la Corée du Sud, et d’autres très vastes avec de vastes ressources et très pauvres comme la République Démocratique du Congo, la Russie. De même, on peut être très peuplé et pauvre ou peu peuplé et riche.
Section 2 : LA GEO-ECONOMIE
Pour certains analystes, les affrontements entre Etats se situent désormais plus dans la sphère économique que dans la sphère politique ; au moins pour les plus riches d’entre eux qui n’envisagent plus la violence armée comme moyen de résoudre leurs différends. Les véritables luttes, même les luttes militaires quand il y en a, seraient plus que jamais des luttes pour la puissance économique. Ainsi, les guerres américaines contre l’Irak seraient motivées uniquement par le pétrole.
Selon Edward Luttwak, auteur du concept, « les capitaux investis drainés par l’Etat sont l’équivalent de la puissance de feu, les subventions au développement des pays correspondent au progrès de l’armement ; la pénétration des marchés avec l’aide de l’Etat remplace les bases et garnisons militaires déployées à l’étranger ».
Quand l’Etat intervient, lorsqu’il encourage, assiste ou dirige ces mêmes activités, ce n’est plus de l’économie au sens propre mais de la géo-économie. Le but n’est plus d’acquérir des territoires comme dans la géopolitique classique, mais une part croissante de la puissance économique mondiale, et le fait est que nombre de chefs d’Etat se comportent souvent comme les commis-voyageurs de leur économie nationale, n’hésitant à user de leur influence politique pour obtenir des contrats ou autres avantages économiques au profit de leurs nationaux. La géo-économie est donc une forme nouvelle des affrontements.
Chapitre 2 : LES ANALYSES SOCIOLOGIQUES ET PSYCHOLOGIQUES
Du point de vue du psychologue ou du sociologue, il n’y a pas « un monde » ou « une humanité » mais « des hommes » et « la société », tous et toutes irréductiblement uniques et différents. Sans nier que le cadre général puisse avoir une influence sur ces Hommes et ces sociétés, le psychologue ou le sociologue estime que ce qui est déterminant c’est l’action des individus, la manière dont les peules réagissent à ces environnements.
Par exemple alors que les deux (2à guerres mondiales se sont bâties sur un puissant antagonisme franco-allemand, la première a abouti à une volonté de revanche allemande plus forte que la seconde, qui, au contraire, a été suivie d’une réconciliation franco-allemande et ceci alors que la défaite de 1918 n’avait pas laissée l’Allemagne détruite comme ce fut le cas en 1945 qui fut pour l’Allemagne « l’année zéro(0) ».Des causes identiques ont produit des conséquences opposées.
Dans le mêmes sens de l’analyse sociologique, on peut indiquer que les Etats-Unis se sont construit sur la violence : violences contre les indiens, violences contre les voisins (Mexique), violences internes (la mythologie des cow-boys justiciers qui font régner le droit par la force). La violence est vue par les américains comme le moyen inévitable, et non légitime, d’apaiser les tensions et de faire, finalement, régner la paix et le Droit. C’est ce qui expliquerait que la guerre soit essentielle à la politique étrangère des Etats-Unis depuis les origines du pays.
Inversement, l’Europe, qui a fait la désastreuse expérience de la guerre pour le Droit en 1914 puis en 1939, a cessé de croire à la valeur purificatrice et progressiste de la violence et refuse désormais de rentrer les logiques de guerres. C’est ce qui expliquerait que dans les situations où les Etats-Unis se comportent comme des « faucons » (Irak, Afghanistan, etc…), les européens soient des « colombes », c’est-à-dire des Etats peu enclins à tout engagement vers une solution militaire.
Au titre de l’analyse psychologique, on peut donner l’exemple suivant :
Les hommes qui étaient au pouvoir en 1945 étaient ceux des administrations Roosevelt successives, qui avaient fait l’expérience du « new deal », expérience politique novatrice qui visait à sortir de la crise économique par une redistribution des richesses et non par une lutte accrue pour celles existantes. Le plan Marshall serait, en quelque sorte, une reprise au niveau international du new deal.
En revanche, la génération qui est au pouvoir depuis 1945 est celle de politiciens qui ont été formés à l’école de la guerre froide et qui ne voient de solutions, dans les problèmes internationaux, que celles qui ont conduit à l’effondrement de l’URSS : dureté, refus des concessions, voire recours à des guerres limitées.
Au plan psychologique, on peut expliquer « l’obsession irakienne » de George W. Bush, dans son désir « de finir le job » que son père n’avait pu terminer lors de la première du Golf et qui avait été considéré, à postériori, comme le plus important échec de son administration.
Il serait hasardeux, toutefois, de faire reposer, sur les seuls facteurs psychologiques ou sociologiques, toute l’analyse ou l’essentielle de l’analyse des relations internationales.
CONCLUSION GENERALE
Le libéralisme et le réalisme demeure les deux (2) grandes théories de l’analyse des relations internationales. Ces théories ont beaucoup évolué. Tour à tour, elles ont connues, au cours du siècle dernier, leurs heures de gloires et de discrédit :
- De 1870 à 1914, la real politik, soutenue par l’exemple de la puissance allemande, a dominé les débats.
- Après 1918, la real politik était complètement discréditée. Le Wilsonisme, théorie libérale a tenu une place centrale avec la création de la Société Des Nations et la conclusion de pacte de sécurité collective (le pacte Briand-Kellogg). Ce n’est qu’à partir de 1935 que le libéralisme sera discrédité.
- Après la seconde guerre mondiale, le libéralisme et le réalisme ont été simultanément en vogue : la guerre froide était une lutte réaliste mais des réalisations libérales impressionnantes (la création de l’ONU, la construction de l’Union Européenne) redonnait du crédit à cette théorie.
- Le libéralisme a surtout semblé triomphé en 1989 avec l’effondrement de l’URSS. Mais cette euphorie n’a pas duré longtemps parce que la seconde guerre du Golfe et surtout les crises générées en Europe par la décadence des pays anciennement communiste et surtout par l’éclatement de la Yougoslavie, ont remis le réalisme en scène.
- Cependant, tant le réalisme que le libéralisme ont beaucoup évolué et les deux (2) doctrines sont plus proches aujourd’hui que naguère ; au point que l’on peut tenter une synthèse. Un certain nombre d’Etat mène à la fois des politiques libérales et des politiques réalistes sans que la contradiction apparaisse insurmontable. Les Etats-Unis sont coutumiers du fait.
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