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Sujet PECOS : Le chômage remet-il nécessairement en cause l’intégration sociale ?

Le chômage remet-il nécessairement en cause l’intégration sociale ?

Le travail est une des instances qui amènent l’individu à se sentir membre à part entière d’une société et à en partager les valeurs et les normes. Ainsi, la société moderne inculque l’éthique du travail à l’individu, à telle enseigne qu’il perçoit le travail comme la seule voie de réalisation de sa propre personne. De ce fait, l’absence prolongée d’emplois dans ce contexte existentialiste est qualifié de chômage. Alors vu comme une situation contraignante d’un individu en âge de travailler, sans emploi et qui en cherche activement, le chômage est un phénomène économique, social et psychologique. Quant à l’intégration sociale, elle peut s’apprécier comme un processus d’insertion d’individus ou de groupe au sein d’un même ensemble ou d’une communauté donnée. L’insertion sociale peut alors passer par des liens marchands mais aussi des liens culturels, sociaux et politiques. Si ce fléau, selon certains enlève à l’individu son identité et partant peut l’exclure de la société d’autres au contraire, estiment que d’autres actions en occurrence l’implication des pouvoirs publics peuvent en atténuer ses effets.

Dans cette optique/ Ceci étant comment le chômage remet-il en cause l’intégration de l’individu ? Le travail est-il la seule source de liens sociaux ? La perte de l’emploi rompt-elle tous les liens qui unissent la société et l’individu ?

Répondre à ces préoccupations/ Lever ces équivoques nécessitera de montrer que l’inactivité ainsi forcée peut remettre effectivement en cause l’intégration de l’individu. Cependant, les effets compensateurs d’autres instances intégratrices que le travail seront mises en évidence.

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Le chômage limite ou fragilise l’insertion économique (P1) et peut conduire à des formes d’exclusion sociale de l’individu (P2).

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Le chômage limite l’insertion économique, en réduisant l’accès aux biens et services produits. En effet, dans les sociétés contemporaines, le travail est au cœur de la cohésion sociale. Ainsi, la société moderne se caractérise par une division du travail qui conduit les individus à entretenir des liens de solidarité organique, c’est-à-dire des liens de complémentarité entre individus. Le manque d’intégration est alors un dysfonctionnement de la société qui conduit à l’anomie. Cette anomie empêche l’individu à s’identifier alors à un groupe. L’inactivité qui la caractérise a des conséquences directes sur le niveau de vie de l’individu. Et l’absence ou l’insuffisance de revenu qui en découle réduit l’accès aux biens et services marchands. Certains postes de dépenses comme les loisirs, la santé, l’habillement sont revus à la baisse. Les difficultés de logement s’accumulent. Une plus grande part du revenu est consommée. La propension à épargner diminue réduisant d’autant la possibilité de constituer un apport pour une acquisition ou une caution. L’accès aux crédits est plus difficile et les coûts du crédit augmentent. Ces mécanismes s’accumulent et détériorent le niveau de vie. Le chômage peut être la première étape d’un processus d’exclusion dans la mesure où il peut enlever à l’individu son identité et le sens de sa vie. Le chômage notamment de longue durée, porte directement atteinte à la dimension économique de l’intégration. Bien que soutenu par un revenu de transfert (indemnités, revenu de solidarité), le chômage déconnecte le chômeur de la légitimité du revenu gagné par le mérite personnel et l’effort. Cette dépendance à l’égard des revenus de transfert et, souvent, à l’égard des soutiens familiaux est destructrice pour l’image que l’individu a de lui-même et pour celle qu’il imagine que les autres se font de lui. Cette disqualification psychosociologique peut contribuer à favoriser l’isolement social, voire à la rupture des solidarités de proximité.

Au-delà de la dimension économique de l’intégration, la privation de travail a également des effets sur la dimension psychologique et sociale de l’intégration. En effet, il dégrade le rapport que l’individu entretien à sa fonction sociale et son statut à travers la place qu’il occupe dans la société et au sentiment qu’il a de son utilité sociale. L’emploi occupé est un trait essentiel du statut social. Dans ce contexte, la perte de son travail peut être la première étape d’un cercle vicieux, décrit comme un processus dynamique de désaffiliation. Les individus bénéficiant d’un emploi stable sont intégrés socialement. Si un individu perd son emploi, il entre dans une zone de vulnérabilité. Les liens sociaux se distendent peu à peu avec les amis, les voisins, la famille. Les relations conjugales peuvent être mises à rudes épreuves. La participation politique et les relations associatives sont réduites. Le réseau social s’appauvrit. Si la situation se prolonge, le niveau d’employabilité se dégrade. Les employeurs potentiels perçoivent cette durée comme un signal négatif. Ils soupçonnent le candidat de retard technologique et de perte de compétences. L’insertion professionnelle devient alors encore plus difficile.

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Le chômage remet en cause un certain nombre de liens qui relient l’individu au reste de la société. Il réduit les échanges économiques et peut fragiliser l’ensemble des liens sociaux. Cependant, le processus n’est pas systématique.

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Cependant/Mais d’autres liens sociaux peuvent en atténuer les effets. Les conséquences économiques et sociales du chômage peuvent être corrigées par la persistance d’autres liens sociaux (P1) et par des interventions publiques (P2).

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La persistance des liens familiaux, amicaux et associatifs peuvent réduire les implications du chômage et empêcher tout sentiment d’exclusion voire de rejet de la société. Le chômage ne recouvre pas la même réalité pour tous individus, selon l’âge, les qualifications et l’expérience professionnelle. La remise en cause de l’intégration sociale ne menace qu’une patrie des chômeurs. L’actif peu qualifié, licencié d’un secteur industriel en recul, à plus à craindre du chômage de longue durée que le sénior à deux ans de la retraite qui n’a pas enfants à charge et à rembourser ses crédits (le chômage est de courte durée, inférieur à un an. Il s’agit du chômage frictionnel, chômage technique ou de conversion et qui ne remet pas en cause durablement l’ensemble des liens sociaux de l’individu. Le chômage à répétions des emplois précaires touche essentiellement les jeunes. C’est aussi pour cette tranche d’âge que la solidarité familiale, la famille étendue joue un important rôle de soutien moral, matériel et pécuniaire. En dehors de la famille, d’autres instances participent à créer des liens sociaux. Il s’agit des associations dans l’intégration sociale : laïques ou religieuses, caritatives ou culturelles et sportives, les associations établissent des liens entre leurs membres et constituent une défense de la cohésion sociale. La société civile peut aussi promouvoir d’autres modes d’échange qui ne réduisent pas aux échanges marchands comme le montre les expériences d’économie sociale ou économie solidaire. L’échange de service peut aussi permettre à un chômeur d’affirmer un statut social en dehors de tout échange marchand. A cela, s’ajoutent enfin, les communautés de quartier, les relatons de voisinage et les amis, qui par des relations interpersonnelles et parfois virtuelles, contribuent aussi à maintenir des liens. A côté de ces liens, existe la présence des pouvoirs publics.

Aussi, les interventions publiques provenant soit de l’Etat, soit des collectivités décentralisées peuvent également réduire les effets du chômage. L’indemnisation du chômage ou des allocations spécifiques de solidarité et des revenus de solidarité. La prise en charge collective des autres risques sociaux (maladies, maternité), l’aide à la formation, ainsi que l’existence de services non marchands (gratuité de l’éducation, santé publique) permettent aussi de limiter l’impact économique du chômage et le risque d’exclusion sociale. Au-delà de l’aspect économique, ces mesures maintiennent aussi l’individu dans une relation d’échange et tendent à le préserver de l’isolement.

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A l’évidence, l’absence d’emploi ne fait pas d’un individu un paria dans la mesure ou d’autres liens de solidarité l’unissent à la société. Ces liens peuvent partir de la famille pour se diversifier et s’étendre aux pouvoirs publics, ce qui contribue à limité les effets du manque de travail.

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En somme, la controverse sur la problématique du chômage en tant que fléau pouvant exclure l’individu de la société fut le contre d’intérêt de cette réflexion. De toute évidence le manque de travail, affecte le pouvoir d’achat de l’individu en limitant sa participation à ce qui est produit et vendu. Ainsi Il affaiblit ses liens sociaux, peut remettre en cause son intégration sociale suivant un processus de désaffiliation progressive, force est d’admettre que d’autres liens de solidarité l’unissent à la société à savoir les liens sociaux et les interventions publiques viennent compenser ces effets. Cependant, toutes les expériences de chômage ne rompent pas nécessairement tous les liens sociaux tissés par un individu. Il s’agit du chômage frictionnel. Toutefois, le chômage ne remet pas nécessairement en cause l’intégration sociale, la détention d’un emploi n’assure peut être que partiellement son insertion. Cependant des politiques actives de création d’emplois pourraient intégrer davantage l’individu et le réconcilier avec son environnement social. Si le travail est alors facteur d’intégration, la désaffiliation et la rupture de solidarité que produit la persistance du chômage dans les pays en voie de développement ne justifient-elles pas l’immigration clandestine ?

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